"C'est cool d'être un geek!": comment le Danemark a rendu l'esport mainstream
Pendant deux jours, les 12.000 sièges de la Royal Arena de Copenhague ont accueilli des passionnés de tous âges pour un tournoi phare du jeu vidéo Counter Strike, démontrant comment le Danemark, grâce à un écosystème favorable, avait fait de l'esport un divertissement grand public.
Venus en famille ou entre amis, les fans danois ont vibré dans une ambiance électrique pour la victoire dimanche de l'équipe locale "Heroic" contre "Faze" lors de la finale d'automne du Blast Premier, l'une des compétitions les plus importantes de l'année sur Counter-Strike. Ce jeu vidéo de tir disputé à cinq contre cinq propose un scénario assez simple: une équipe doit poser une bombe, tandis que l'autre doit l'en empêcher avant la fin d'un round de deux minutes.
Alors que dans de nombreux pays, l'esport est encore en quête de reconnaissance, au Danemark, les tournois de jeu vidéo font aujourd'hui partie de la culture mainstream et sont régulièrement diffusés à la télévision, à l'image de n'importe quel sport traditionnel.
Il faut dire que le secteur bénéficie ici du soutien des autorités depuis plusieurs années. En 2018, le Premier ministre Lars Løkke Rasmussen avait fait sensation en s'exprimant sur scène au cours de la cérémonie d'ouverture du tournoi.
- Avant-garde -
"Au début, on voyait l'esport comme un truc de geek, mais maintenant c'est devenu cool d'être un geek", déclare à l'AFP Ditte, une fan danoise de 29 ans qui a commencé à s'intéresser au secteur à la faveur des confinements récents.
Maquillée aux couleurs de son pays, elle a donné de la voix pour participer à l'ambiance enflammée qui a régné dans l'enceinte, alors qu'au même moment, l'équipe nationale de football affrontait la France au Mondial-2022 au Qatar (défaite 2-1).
Selon Charlotte Kenny, directrice générale de Blast, l'organisateur de l'événement, ce succès s'explique car "la communauté danoise est très adepte de nouvelles technologies de manière générale".
"Par rapport à d'autres pays, je pense que le Danemark a été à l'avant-garde pour comprendre quelles opportunités l'esport pouvait offrir", ajoute-t-elle. "Il y a énormément d'intérêt de la part d'écoles, d'universités ou du gouvernement, qui regardent l'esport comme un moyen de créer des emplois."
- Esport-étude -
Cette approche a donc créé un environnement favorable pour le développement du haut niveau, estime le joueur Casper Møller, alias "CadiaN". "Il y a vraiment un bon écosystème ici qui permet de faire éclore de nouveaux talents. Et beaucoup d'anciens joueurs transmettent leur savoir aux jeunes."
"Mais surtout, le Danemark a fait entrer l'esport dans le système scolaire donc il y a beaucoup d'opportunités ici", poursuit ce joueur vétéran de 27 ans.
Le pays propose en effet un système d'"esport-étude", permettant aux jeunes Danois de participer à des ligues compétitives dès le collège.
Contrairement à beaucoup de parents inquiets de voir leurs enfants passer des heures sur leur console ou leur ordinateur, Benjamin Knudsen, venu avec son fils de 13 ans Elias, estime ainsi que l'esport "est une bonne manière pour eux d'interagir socialement". "Ok ils restent dans leurs chambres mais en ayant des interactions", dit-il.
Cette compétition a en tout cas offert un aperçu de ce qui attend les fans français en mai 2023, lorsque l'Accor Arena de Bercy accueillera le Major de Counter-Strike, l'un des plus grands rendez-vous du calendrier esport mondial.
S.Lopez--ESF