Arrestation d'une membre de l'ex-RAF après une longue clandestinité
La justice allemande a annoncé mardi l'arrestation d'une membre présumée de l'ex-organisation violente d'extrême gauche Fraction Armée rouge (RAF), responsable de plusieurs attentats en Allemagne, mettant fin à une cavale de plus de 30 ans.
Après de longues années d'une enquête marquée par de nombreux revers, il aura suffi d'un "indice décisif en provenance de la population" pour retrouver Daniela Klette, 65 ans, dans un appartement à Kreuzberg, dans le centre de Berlin, a déclaré mardi le chef de la police judiciaire de Basse-Saxe, Friedo de Vries, au cours d'une conférence de presse.
Il s'agit d'"un événement majeur dans l'histoire criminelle allemande", s'est félicitée la ministre de l'Intérieur de cette région, Daniela Behrens.
La suspecte et ses deux complices présumés Ernst-Volker Staub et Burkhard Garweg sont recherchés depuis les années 1990 pour leur participation supposée à la RAF, un groupe d’extrême gauche qui prônait la lutte armée et qui a tué une trentaine de personnes essentiellement à partir de 1971 et pendant plus de vingt ans.
L'enquête de la police de Basse-Saxe contre ces trois personnes concerne des faits de criminalité de droit commun : tentative de meurtre et divers vols qualifiés et tentatives de vols, entre 1999 et 2016. Elles sont soupçonnées de les avoir commis surtout pour pouvoir assurer leur train de vie.
Qualifiant de "grand succès" l'arrestation de "la terroriste présumée", la ministre allemande de l'Intérieur Nancy Faeser a souligné que l'Etat de droit avait "montré sa persévérance et son endurance : personne ne devrait se sentir en sécurité dans la clandestinité".
- "Très sympathique" -
L'arrestation de Mme Klette, la seule femme qualifiée de "dangereuse" dans la liste d'Europol des criminels les plus recherchés, remonte à lundi. Les enquêteurs ont appréhendé cette femme dans l'appartement dont elle n'était pas la locataire officielle et où elle vivait sous un faux nom. Elle n'a opposé aucune résistance.
Son identité a été pu être clarifiée "sans aucun doute" grâce aux empreintes recueillies sur un document d'identité, selon M. de Vries.
Mardi dans l'après-midi, des policiers chargés de matériel continuaient leurs allées et venues dans l'immeuble, a constaté un journaliste de l'AFP. Au cours des perquisitions, ils ont retrouvé des munitions mais pas l'arme correspondante.
"Elle se faisait appeler Claudia et était très sympathique, elle allait toujours se promener avec son chien", a témoigné un voisin, Veli Ergün, 54 ans, auprès du journal Bild, selon lequel elle vivait dans l'appartement avec un homme du même âge.
Mardi, elle a été placée en détention provisoire après avoir été présentée à un juge de Verden qui a émis six mandats d'arrêt à son encontre.
Une autre personne a été arrêtée en lien avec cette affaire, a annoncé M. de Vries, sans pouvoir pour l'instant révéler son identité.
- Attentat à la bombe -
Côté RAF, Mme Klette est mise en cause par le parquet antiterroriste avec ses deux complices présumés dans un attentat à la bombe le 27 mars 1993 contre le centre de détention en construction de Weiterstadt.
Il n'avait pas fait de victimes mais occasionné pour plus de 60 millions d'euros de dégâts.
Elle est également recherchée pour un attentat à la bombe manqué contre un bâtiment de la Deutsche Bank, le 25 février 1990, ainsi que pour une attaque à l'arme automatique contre l'ambassade américaine le 13 février 1991 à Bonn (ouest).
Issue de la frange radicale du mouvement étudiant de 1968 et connue sous le nom de "Bande à Baader-Meinhof" - les patronymes de ses fondateurs Andreas Baader et Ulrike Meinhof -, la RAF prônait une "guérilla urbaine" contre le gouvernement et l'élite allemande.
Au nom de la lutte anti-impérialiste, ses membres ont ébranlé la République fédérale d'Allemagne (RFA) pendant les "années de plomb", via des attentats, des enlèvements et des assassinats ayant visé les "hauts dirigeants de l'économie et de l'Etat" et les forces américaines.
Ses principaux leaders, dont Meinhof et Baader, se sont suicidés en prison dans les années 70. Les actes de la RAF ont fait 34 morts, avant que le groupe ne se dissolve de lui-même en avril 1998.
A.M.Ruiz--ESF