Rétractation de Takieddine: Carla Bruni devant un juge mardi pour une éventuelle mise en examen
Après son mari en octobre, c'est au tour de Carla Bruni-Sarkozy d'être entendue en vue d'une éventuelle mise en examen dans les investigations à Paris sur la rétractation en 2020 de l'intermédiaire Ziad Takieddine, qui accusait son mari d'avoir financé sa campagne présidentielle 2007 avec des fonds libyens.
Carla Bruni-Sarkozy était convoquée mardi à 10H00 devant un juge d'instruction financier du tribunal judiciaire de Paris, selon une source proche du dossier à l'AFP.
Cette information a été confirmée à l'AFP par trois autres sources proches du dossier.
Son interrogatoire "est susceptible de se prolonger" mercredi, a souligné l'une d'elles.
A l'issue, la chanteuse et mannequin doit être soit mise en examen pour recel de subornation de témoin et association de malfaiteurs en vue de la préparation d'escroqueries au jugement en bande organisée et en vue de la corruption de personnels judiciaires libanais, soit placée sous le statut plus favorable de témoin assistée, selon l'une des sources proches.
Sollicités par l'AFP, ses avocats, Paul Mallet et Benoît Martinez, n'ont pas commenté à ce stade.
Dans ce dossier judiciaire ouvert depuis le printemps 2021, Nicolas Sarkozy a été mis en examen en octobre pour recel de subornation de témoin et association de malfaiteurs en vue de la préparation d'escroqueries au jugement en bande organisée.
Ses avocats ont déposé en avril une requête pour faire annuler ces poursuites, puis une demande de dépaysement de l'enquête.
L'ancien chef d'Etat est suspecté d'avoir avalisé des manœuvres pour obtenir en novembre 2020 une volte-face de Ziad Takieddine, principal témoin à charge dans l'affaire du financement de sa campagne présidentielle en 2007 par des fonds libyens, qui sera jugé en 2025.
Dans une interview à BFMTV et Paris-Match depuis Beyrouth (Liban), où il vit, l'intermédiaire avait déclaré que l'ex-chef de l'Etat n'avait "pas touché un centime, cash ou pas cash" de la part du défunt dictateur libyen Mouammar Kadhafi.
Une douzaines d'autres personnes sont mises en examen pour avoir participé, à des moments et degrés divers, à cette opération qui aurait principalement visé à tromper la justice française.
Parmi ces suspects figurent notamment Michèle Marchand dite "Mimi", ex-papesse de la presse people et amie de Carla Bruni-Sarkozy, l'intermédiaire Noël Dubus, déjà condamné pour escroquerie ou le chef d'entreprise David Layani.
- "Stupidement naïve" -
Carla Bruni a déjà été entendue deux fois par les enquêteurs de l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), comme témoin en juin 2023, puis suspecte début mai.
L'épouse de l'ancien chef de l'Etat est soupçonnée d'avoir demandé fin 2019 une ligne téléphonique occulte, qui aurait servi au couple Sarkozy de recevoir des messages de Mimi Marchand sur le déroulement de l'opération.
Devant les enquêteurs en mai, elle a nié détenir cette ligne et a affirmé tout ignorer du déplacement de Mimi Marchand à Beyrouth mi-octobre 2020 pour l'interview de Ziad Takieddine.
L'un des messages semble pourtant prouver que l'ex-Première dame avait été informée en amont du déplacement de Mimi Marchand.
Acculée par les questions des enquêteurs sur les incohérences de sa version concernant ce téléphone occulte, la chanteuse a peiné à trouver des réponses. "Tout à fait. Je comprends bien. Mais ce n'est pas mon numéro". Avant d'ajouter: "J'essaie d'échafauder des explications".
Carla Bruni-Sarkozy, qui était une amie de longue date de Mimi Marchand, l'a décrite comme une personne "maligne, mais pas forcément dans la vérité" et "très manipulatrice".
Elle a déclaré se sentir "stupidement naïve" et "responsable de la mise en examen" de son époux.
"C'est moi qui devrait (l)'être", a-t-elle affirmé, se présentant comme "seul contact" de son mari avec Mimi Marchand, qui "a utilisé le nom de (son) mari et le (sien) (...) pour se donner du poids auprès de ses compères".
C'est la thèse qu'avait avancée l'ancien président devant deux juges d'instruction lors de son interrogatoire en octobre. Il s'était présenté comme impliqué à tort dans cette affaire à cause d'une "petite bande" de "pieds nickelés" avides d'argent.
V.Abaroa--ESF