Les machinistes de Boeing votent sur le principe d'une grève qui gèlerait la production
Plusieurs dizaines de milliers d'employés de Boeing étaient appelés à voter mercredi après-midi lors d'un raout à Seattle, dans le nord-ouest des Etats-Unis, par le syndicat des machinistes, sur le principe de faire grève en cas d'échec des négociations salariales.
"Que pouvez-vous faire pour obtenir une bonne convention collective? Participez au vote le 17 juillet sur la grève sanction", avait enjoint l'antenne à Seattle du syndicat international des machinistes et des ouvriers de l'aérospatial (IAM).
L'IAM-District 751 avait vu les choses en grand en réservant le T-Mobile Park, qui abrite l'équipe de baseball des Seattle Mariners et compte près de 48.000 places.
Selon quelques images diffusées par le syndicat sur YouTube, des centaines de personnes ont fait le déplacement.
Certaines brandissaient des pancartes avec les slogans "Un vote oui est notre force" ou "Nous voulons nos retraites maintenant", tandis que d'autres faisaient tournoyer des serviettes -comme lors de matches.
De grandes banderoles avaient été déployées: "Nous méritons davantage 2024", "Nouvel avion" et "Lutter pour davantage".
Le District 751 représente près de 32.000 adhérents dans la région, dont quelque 30.000 employés chez Boeing notamment dans les usines d'assemblage du 737 à Renton et du 777 à Everett. En cas de grève, elles resteront figées.
Le résultat du vote est attendu dans la soirée.
Boeing et l'IAM-District 751 ont engagé le 8 mars des négociations pour élaborer la nouvelle convention collective qui doit relayer celle expirant le 12 septembre à minuit, vieille de seize ans.
"Nous restons optimistes sur le fait que nous pourrons parvenir à un accord équilibré entre les besoins de nos employés et les réalités d'entreprise auxquelles le groupe fait face", a indiqué Boeing à l'AFP.
Le syndicat réclame une hausse salariale "substantielle", d'au moins 40% sur trois ans, ainsi que de meilleurs avantages sociaux (assurance santé, retraite, coût de la vie, etc.) et la sécurité de l'emploi, expliquait récemment à l'AFP Jon Holden, président de cette branche.
- "Garantie d'emploi" -
Les rémunérations "stagnent depuis huit ans", avec seulement quatre hausses de 1% sur cette période malgré une "inflation massive".
Dave Calhoun, patron de Boeing, a assuré le 16 juin devant une commission d'enquête du Sénat que les syndiqués de l'IAM obtiendraient "à coup sûr, une augmentation". Sans autre détail.
Concernant la sécurité de l'emploi, autre axe majeur des tractations, le syndicat n'en démord pas: le prochain avion -annoncé pour 2035- doit absolument être fabriqué dans la région.
"C'est une garantie d'emploi pour les cinquante prochaines années", selon M. Holden.
D'après l'IAM, les négociations restent au point mort depuis plusieurs semaines.
Partie intégrante de sa stratégie, le syndicat comptait sur une forte mobilisation mercredi pour montrer ses muscles à Boeing.
Il s'agit non seulement "de montrer la solidarité et le soutien" des adhérents envers leurs négociateurs mais aussi "de faire entendre (leur) voix à travers le monde ce jour-là", expliquait le syndicat en amont.
Il avait organisé un cortège de près de 800 motos dans la matinée sur une artère de Seattle, baptisée "équipée de solidarité", dont quelques images ont été diffusées sur YouTube.
"Quand nous serons tous présents à cet important événement, l'usine sera silencieuse", avait prévenu le syndicat, en guise d'aperçu des conséquences d'une grève.
- "Nous tenons à cette entreprise" -
Le District W24, qui représente environ 1.200 employés de Boeing à Portland, dans l'Oregon, négocie aussi depuis le 8 mars et devait également voter mercredi.
La Grande Loge de l'IAM doit ensuite être notifiée et pourra se préparer, en cas de "oui", à indemniser les grévistes 250 dollars par semaine à partir de la troisième semaine d'arrêt de travail.
Mais un appel effectif à la grève nécessitera un second vote, une fois la date butoir passée.
Le syndicat tente aussi d'obtenir au moins un siège au conseil d'administration du groupe, qui traverse ce qui pourrait s'apparenter aux sept plaies d'Egypte.
Depuis de longs mois, le géant cumule en effet problèmes de production et de qualité sur ses trois avions commerciaux 737, 787 et 777, qui ont entraîné moult enquêtes. De nombreuses actions sont mises en oeuvre pour y remédier.
"Nous n'avons jamais demandé cela par le passé, mais il en va de notre réputation, de nos emplois, de notre gagne-pain", avait justifié M. Holden. "Nous tenons à cette entreprise et nous avons le droit d'avoir un mot à dire sur certains changements."
V.Martin--ESF