Un nouveau décès de migrant dans la Manche et trois corps découverts sur des plages en une journée
Une mer calme, d'innombrables tentatives de traversée, un migrant mort en mer tout près de la côte du Pas-de-Calais puis trois corps découverts sur plusieurs plages: le bilan humain ne cesse de s'alourdir dans la Manche, que 32.000 exilés ont tenté de traverser cette année.
Dans la nuit de mardi à mercredi et mercredi matin, à la faveur d'une fenêtre météorologique favorable à ces dangereuses traversées, de nombreux canots de migrants ont pris la mer.
En début de matinée, une embarcation a été signalée en difficulté dans le secteur d'Hardelot, a rapporté la préfecture maritime de la Manche et de la Mer du Nord (Premar).
Le centre régional opérationnel de sauvetage a alors envoyé un bateau et un hélicoptère de la Marine pour lui porter secours. Les personnes à bord de l'hélicoptère ont repéré une quinzaine de personnes à l'eau, "proches de la plage", et les ont hélitreuillées vers le rivage, selon la Premar. Malgré l'intervention des secours, un migrant, adulte, est décédé.
En tout, 61 personnes ont été prises en charge, selon le commandant des pompiers Baptiste Gournay, faisant état d'une personne en "urgence absolue" et de cinq en "urgence relative", évacuées vers l'hôpital de Boulogne-sur-Mer, en plus de l'homme décédé, âgé de 28 ans selon lui.
Le parquet de Boulogne-sur-Mer a indiqué qu'il "pourrait être koweïtien".
Le commandant Gournay a évoqué une autre opération à Merlimont, un peu plus au sud, avec trois migrants en "urgence absolue".
Quelques heures plus tard, trois corps de migrants ont été découverts à marée basse sur plusieurs plages, dont celle de Neufchâtel-Hardelot. La date du décès de ces hommes n'est pas encore connue.
"Pour l'instant on compte les décès et ensuite on va essayer de voir comment on peut les rapprocher", a constaté le procureur adjoint, Patrick Leleu.
- Un décès tous les cinq jours -
Mercredi matin, d'importants moyens de secours ont été déployés sur le front de mer de Neufchâtel-Hardelot, où des migrants ont été conduits dans des halls d'immeubles pour se réchauffer.
Selon une membre de l'association Utopia 56 sur place, plusieurs migrants se trouvaient "en hypothermie sévère". Un canot crevé git sur la plage. La route est jonchée de vêtements trempés.
Quelques heures après le drame, des journalistes de l'AFP ont assisté à une autre tentative de traversée à proximité immédiate. Sur une plage entre Neufchâtel-Hardelot et Equihen, quelque 70 migrants, dont plusieurs enfants, se sont jetés à l'eau pour rejoindre un canot venu les chercher, utilisant le système du "taxi-boat".
Le canot n'a pas réussi à démarrer et environ 40 migrants sont revenus sur la plage. Le bateau a finalement démarré et s'est éloigné, emportant une trentaine de migrants.
L'AFP a assisté à deux autres départs dans la nuit, depuis Sangatte.
"Le chiffre qui nous saute aux yeux depuis quelques mois, c'est une personne qui décède tous les cinq jours" dans ces tentatives de traversée, a réagi l'un des coordinateurs d'Utopia 56 sur le littoral, Célestin Pichaud. "La situation est plus que dramatique. Les secours en mer et sur terre sont dépassés par les événements". Il dénonce la "volonté désastreuse de continuer dans la voie de la répression".
Dimanche matin, un autre migrant est mort après une tentative de départ depuis la plage de Tardinghen.
Noyades et bousculades mortelles, sur des canots surchargés, ont fait de 2024 l'année la plus meurtrière depuis le début du phénomène des traversées de la Manche sur de frêles embarcations, en 2018.
Mercredi dernier, trois migrants sont décédés dans un naufrage. Le parquet de Boulogne-sur-Mer avait fait état en début de semaine d'une "interrogation" persistante sur ce naufrage, en raison d'un écart entre le nombre de personnes secourues et certains témoignages décrivant la présence de passagers plus nombreux à bord du bateau.
La semaine précédente, un nourrisson avait trouvé la mort dans un autre naufrage.
Depuis le début de l'année, selon la Premar, 32.000 personnes ont tenté la traversée, dont plus de 5.600 ont été secourues et ramenées vers les côtes françaises.
L.Balcazar--ESF