Au procès du 13-Novembre, le parquet antiterroriste termine ses réquisitions
Les trois représentants du parquet national antiterroriste (Pnat) se sont lancés vendredi dans la conclusion de leur réquisitoire-marathon au procès des attentats du 13-Novembre, six ans et demi après "la soirée d'épouvante" qui a fait 130 morts à Paris et Saint-Denis.
"Ceux qui ont commis ces crimes abjects ne sont rien d'autres que des vulgaires terroristes, des criminels", a affirmé l'avocat général Nicolas Le Bris au début de son ultime prise de parole.
A l'issue de son réquisitoire, Nicolas le Bris et ses deux collègues du Pnat, Camille Hennetier et Nicolas Braconnay, doivent annoncer les peines qu'ils réclament à l'encontre de Salah Abdeslam et de ses 19 coaccusés.
Douze accusés, dont six jugés en leur absence, encourent la réclusion criminelle à perpétuité.
"La fureur sanguinaire de ces criminels était sans limite", a estimé Nicolas Le Bris en revenant en détail sur les attaques devant le Stade de France, sur les terrasses de cafés parisiennes et au Bataclan.
Dans la salle de spectacle ce fut "un massacre, un carnage qu'ils voulaient perpétrer", a-t-il dit: "malheureusement ils y sont parvenus". Sur les terrasses, "une douce soirée de novembre s'est terminée en cauchemar".
"La lâcheté pourrait être la devise" du groupe État islamique (EI), a estimé Nicolas Le Bris avant de compléter sa phrase en parlant de "lâcheté et perversion".
- "Jihadistes aguerris" -
Depuis mercredi, les trois représentants du Pnat reconstituent méticuleusement "le puzzle" des pires attaques commises sur le sol français, de la genèse du projet né en Syrie au recrutement de "jihadistes aguerris" par l'EI, jusqu'aux ultimes préparatifs.
Pendant les onze premières heures de leurs réquisitions, les avocats généraux ont, dans un exposé précis et parfois aride, décortiqué les charges qu'ils retiennent à l'encontre des 20 accusés renvoyés devant la cour d'assises spéciale de Paris.
Le Pnat demandera-t-il la perpétuité avec une période de sûreté "incompressible" contre Salah Abdeslam, unique membre encore en vie des commandos qui ont frappé la France le 13 novembre 2015, sidérant le pays ?
L'accusation a éreinté jeudi la ligne de défense de Salah Abdeslam. Resté mutique pendant la quasi-totalité de l'enquête, le Français de 32 ans a affirmé à plusieurs reprises à l'audience avoir "renoncé" à déclencher sa ceinture explosive le soir des attentats, "par humanité".
Il a assuré avoir rejoint la cellule jihadiste "au dernier moment", contestant avoir été "une véritable recrue" ou même un "remplaçant", a relevé jeudi Nicolas Le Bris, ironisant sur ce prétendu rôle du "terroriste tombé du ciel".
"Il cherche à vous endormir", a lancé le magistrat vendredi. En évoquant maintenant qu'il devait se faire exploser dans un café du XVIIIe arrondissement, "une cible personnelle, accessoire", et plus au Stade de France ou dans le métro, Salah Abdeslam "cherche à couper tout lien avec la cellule" jihadiste, a appuyé Nicolas Le Bris vendredi.
- "Conviction" -
Voisin loquace de box et ami d'enfance de Salah Abdeslam, Mohamed Abrini, "l'homme au chapeau" des attentats de Bruxelles en mars 2016, était lui aussi "bien prévu" pour le 13-Novembre, selon le parquet.
Il avait la veille accompagné les commandos dans le "convoi de la mort" de Bruxelles à la région parisienne.
Son "départ précipité" dans la nuit du 12 au 13 novembre 2015, dû selon l'accusation à un renoncement de dernière minute, a "constitué un imprévu pour tous les membres des commandos", a estimé Nicolas Le Bris.
Le parquet s'est dit "convaincu" que "11 hommes" devaient faire partie des commandos. Tout comme il a "la conviction" que les accusés Osama Krayem et Sofien Ayari devaient "commettre un attentat le soir du 13 novembre" à l'aéroport de Schiphol, à Amsterdam.
Le "pourquoi" de leur renoncement reste un mystère mais ils sont les "deux survivants des commandos néerlandais", a lancé Nicolas Le Bris.
Membres d'une même cellule dont les commandos sont "interchangeables" et des "machines à tuer", le Suédois Osama Krayem et le Tunisien Sofien Ayari sont "bel et bien" pour le ministère public les "complices" des attentats commis à Paris et Saint-Denis.
L'accusation n'a pas non plus épargné les 10 autres accusés présents, soupçonnés d'avoir apporté leur aide à la cellule.
La parole sera donnée à la défense à partir de lundi et pour deux semaines. Le verdict est attendu le 29 juin.
L.Balcazar--ESF