La France rapatrie 35 mineurs et 16 mères de camps syriens
La France a rapatrié mardi 35 mineurs et 16 mères des camps de déplacés en Syrie, dont Emilie König, l'une des jihadistes françaises les plus connues, éveillant l'espoir des ONG et familles de voir cesser la politique "inhumaine" du "cas par cas".
Le ministère français des Affaires étrangères l'a annoncé dans un communiqué mardi, quelques heures après la formation d'un nouveau gouvernement, précisant que ces enfants et ces femmes se trouvaient jusqu'alors dans les camps du nord-est de la Syrie.
Il s'agit du premier rapatriement massif d'enfants et de leurs mères depuis la chute en 2019 du "califat" du groupe État islamique (EI) d'où avaient été notamment planifiés les attentats meurtriers du 13 novembre 2015 en France.
Selon un communiqué du Parquet national antiterroriste (PNAT), sept des 35 mineurs sont des enfants isolés.
Quant aux femmes, âgées de 22 à 39 ans, "quatre avaient déjà consenti au retour de leurs enfants au cours des derniers mois" et "12 sont revenues accompagnées de leurs enfants". Elles ont la nationalité française "sauf deux d’entre elles qui ont en revanche des enfants français".
Huit ont été placées en garde à vue "en exécution d'un mandat de recherche" et huit autres faisant "l'objet d'un mandat d'arrêt", selon le PNAT, devraient se voir notifier dès mardi leur inculpation.
Un mineur de 17 ans a également été placé en garde à vue à la DGSI (sécurité intérieure), selon une source proche du dossier.
Parmi les rapatriées, figure Emilie König, 37 ans, originaire de Lorient (Ouest), partie en Syrie en 2012 et soupçonnée d'avoir agi comme recruteuse pour l'EI.
Elle a été placée en détention provisoire après avoir été mise en examen par un juge antiterroriste, a constaté l'AFP lors d'une audience devant le juge des libertés et de la détention (JLD).
"Elle a l'intention de coopérer pleinement avec la justice française", a déclaré à l'AFP son avocat Emmanuel Daoud.
Une femme atteinte d'un cancer du colon, qui a déjà subi deux ablations, a également été rapatriée avec ses quatre enfants. "Il était temps", a commenté Me Daoud, qui la défend également.
- "Grand soulagement" -
"Les services de renseignement sont venus hier matin dans les camps de Roj avec des listes et photos des familles qu’ils entendaient rapatrier", a témoigné sous le couvert de l'anonymat l'oncle de deux enfants encore sur place.
"Je sais à quel point les enfants français laissés dans les camps souffrent de ne pas avoir été emmenés avec leurs copains et leurs mères", a souligné Me Marie Dosé, conseil de familles encore sur place. "Il reste plus de 150 enfants et leurs mères", selon elle.
"C’est un grand soulagement, on n’aura plus à s’inquiéter jour et nuit pour leur vie", témoigne auprès de l'AFP la tante d'un mineur rentré avec sa mère.
Ces 35 enfants, pris en charge par l'Aide sociale à l'enfance, rejoignent les 126 mineurs déjà revenus depuis 2016 de territoires repris à l'EI.
En 2019, près de sept Français sur dix étaient opposés au retour des enfants de jihadistes, selon un sondage Odoxa-Dentsu Consulting pour France Info et Le Figaro.
La question reste aujourd'hui lancinante dans le débat politique en France où des avocats, parlementaires, ONG et instances indépendantes exhortent régulièrement les autorités à suivre l'exemple de voisins européens. L'Allemagne et, plus récemment, la Belgique ont récupéré une grande partie de leurs ressortissants détenus dans les camps syriens qui regroupent déplacés de guerre et proches de jihadistes.
Mardi, la secrétaire d’État à l'Enfance Charlotte Caubel a twitté: "Nous poursuivrons leur rapatriement tant qu’il le faudra pour les protéger".
Le "Collectif des familles unies" a de son côté indiqué dans un communiqué "espérer" que ce rapatriement "signe la fin de cette abjecte politique du +cas par cas+ qui revient à trier des enfants, à séparer les fratries et à arracher des enfants à leurs mères".
La Défenseure des droits Claire Hédon a souligné "l'urgence" à les rapatrier, décrivant "les conditions épouvantables de vie, avec des problèmes de nutrition, des problèmes de santé, un non-accès à l’école".
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G.Alamilla--ESF