L'enquête sur un financement libyen de la campagne 2007 de Sarkozy
Rappel de l'affaire du financement libyen supposé de la campagne 2007 de Nicolas Sarkozy, sur laquelle des juges français enquêtent depuis 2013.
- Révélations et enquête -
En 2012, des accusations de financement libyen de la campagne 2007 de Nicolas Sarkozy, lancées l'année précédente par le fils de Mouammar Kadhafi, Seif al-Islam, se précisent: Mediapart publie des documents affirmant que Tripoli aurait, en 2006, donné son accord pour un financement de 50 millions d'euros.
Nicolas Sarkozy porte plainte. Une enquête pour "publication de fausse nouvelle" se soldera par un non-lieu.
Le 3 mai, l'ex-Premier ministre libyen al-Baghdadi al-Mahmoudi, emprisonné en Tunisie, affirme, selon des propos rapportés par ses avocats tunisiens, que la Libye a bien financé la campagne 2007 de Nicolas Sarkozy. Dans la soirée, un avocat français disant également le représenter dément qu'il ait tenu ces propos. Il reformulera ces accusations plus tard.
En décembre, l'homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine affirme devant un juge détenir des preuves de ce financement libyen.
Le 19 avril 2013, le parquet de Paris ouvre une information judiciaire contre X.
- Les tableaux de Guéant -
Fin avril, le Canard Enchaîné révèle qu'une perquisition chez l'ex-ministre de l'Intérieur Claude Guéant a permis de découvrir un versement de 500.000 euros depuis l'étranger effectué en 2008 sur un compte de l'ex-homme de confiance de Nicolas Sarkozy.
M. Guéant justifie cette somme par la vente de tableaux de maître à un avocat malaisien.
Le 7 mars 2015, l'ancien ministre est mis en examen pour faux et usage de faux, et blanchiment de fraude fiscale en bande organisée.
- Nouvelles accusations -
En septembre 2016, le carnet de Choukri Ghanem, ancien ministre libyen du Pétrole mort quatre ans plus tôt, est transmis aux enquêteurs. Il mentionne trois versements en 2007 destinés à Nicolas Sarkozy, totalisant au moins 6,5 millions d'euros.
Le 15 novembre, Ziad Takieddine affirme avoir remis 5 millions d'euros en liquide, provenant de Libye, en 2006 et 2007 à Nicolas Sarkozy et Claude Guéant. En 2020, M. Guéant fera condamner Ziad Takieddine pour diffamation.
M. Takieddine est mis en examen le 7 décembre 2016, pour complicité de corruption et de trafic d'influence notamment.
Le 8 janvier 2018, l'homme d'affaires franco-algérien Alexandre Djouhri, soupçonné d'avoir servi d'intermédiaire, est arrêté à Londres. Extradé vers la France, il sera mis en examen notamment pour "corruption active" deux ans plus tard.
- Mises en examen -
Le 21 mars 2018, M. Sarkozy est mis en examen pour "corruption passive, financement illégal de campagne électorale et recel de fonds publics libyens". Il fait appel.
Le 29 mai, Eric Woerth, ancien trésorier de la campagne, est à son tour mis en examen, pour complicité de financement illégal.
La mise en examen de Claude Guéant est aggravée le 17 septembre, notamment de l'infraction de "corruption passive".
Le 24 septembre 2020, la cour d'appel de Paris valide l'enquête.
Le 12 octobre, Nicolas Sarkozy est à nouveau mis en examen, cette fois pour "association de malfaiteurs".
Deux mois plus tard, Claude Guéant et un autre ex-ministre, Brice Hortefeux, le seront à leur tour pour cette infraction.
- Revirements de Takieddine -
Le 11 novembre 2020, Ziad Takieddine, en fuite au Liban, dédouane dans la presse française l'ex-chef de l'Etat et accuse l'ancien juge d'instruction en charge du dossier, Serge Tournaire, d'avoir déformé ses propos.
Mais, auditionné à Beyrouth par les juges français le 14 janvier 2021, Takieddine incrimine à nouveau l'ex-chef de l'Etat.
Le 5 juin, Mimi Marchand, figure de la presse people, ainsi que plusieurs autres personnes soupçonnées d'avoir oeuvré pour que Takieddine se rétracte en novembre, sont mis en examen à Paris pour "subornation de témoin" dans une enquête incidente.
De nouveau auditionné en novembre au Liban par les magistrats parisiens, Takieddine affirme avoir été "manipulé" lors de l'entretien accordé à la presse.
Fin 2021, la Cour de cassation balaie le dernier recours procédural déposé par Nicolas Sarkozy et ses proches contre l'enquête "libyenne" et valide, au moins temporairement, les investigations.
Entre septembre 2021 et juin 2022, l'enquête sur la rétractation de Ziad Takieddine est étendue à des soupçons de tentatives de corruption de magistrats libanais qui auraient visé à faire libérer de prison l'un des fils Kadhafi, Hannibal dans l'objectif que celui-ci produise des éléments dédouanant Nicolas Sarkozy.
G.Bardales--ESF