Le Nigeria ralenti par une grève générale, reprise de négociations sur le salaire minimum
Ecoles et aéroports fermés, coupures d'électricité: le Nigeria a tourné au ralenti lundi à cause d'une grève générale liée à un désaccord entre syndicats et gouvernement sur le montant du salaire minimum, sur fond de grave crise économique.
Les principaux syndicats du pays le plus peuplé d'Afrique, le Congrès du travail du Nigeria (NLC) et le Congrès des syndicats (TUC), avaient exhorté les travailleurs à ne pas se rendre au travail après que le gouvernement avait refusé d'augmenter le salaire minimum au-delà des 60.000 nairas qu'il proposait (environ 40 euros).
Actuellement, le salaire minimum est fixé à 30.000 nairas (environ 20 euros) et le NLC réclame qu'il soit porté à 494.000 nairas (environ 300 euros).
Face à l'ampleur de la grève, le gouvernement nigérian a publié dans la journée un "appel aux syndicats" pour "poursuivre les discussions" et parvenir à "une solution pacifique".
A l'issue d'un entretien, il a été convenu que le président Bola Ahmed Tinubu "s'engage à proposer un salaire minimum supérieur à 60.000 nairas" et que des réunions entre le gouvernement et les syndicats auraient lieu "tous les jours de la semaine à venir" afin de parvenir à un accord, selon un communiqué signé par les ministres de l'Information et du Travail ainsi que par les présidents du NLC et du TUC.
Il n'était pas clair si la grève allait se poursuivre mardi.
Le mouvement de grève général a fortement perturbé la vie du pays, avec notamment une coupure du réseau national d'électricité dès la nuit de dimanche à lundi, engendrant des pannes dans tout le pays.
Le trafic aérien a aussi été fortement perturbé du fait de l'annulation des vols intérieurs.
Plusieurs compagnies aériennes nigérianes ont prévu des perturbations pour la journée de mardi, d'autant que des syndicats des employés du transport aérien ont annoncé que la grève touchera les vols internationaux à partir de mardi.
Depuis son arrivée au pouvoir il y a un an, le président Bola Ahmed Tinubu a mis fin à la subvention des carburants et au contrôle des devises, ce qui a entraîné un triplement des prix de l'essence et une hausse du coût de la vie, le naira ayant chuté par rapport au dollar.
En avril, l'inflation s'élevait à 33,6% sur un an, selon les données de la Banque centrale nigériane, forçant de nombreux Nigérians à sauter des repas ou à abandonner certains produits comme la viande, les oeufs ou le lait.
M. Tinubu a appelé à la patience pour permettre à ses réformes de porter leurs fruits, affirmant qu'elles contribueraient à attirer les investissements étrangers.
- "Pas de travail" -
Dans la capitale Abuja, des bureaux gouvernementaux, des stations-service et des tribunaux étaient fermés lundi matin, tandis que de longues files d'attente se formaient devant les portes verrouillées de l'aéroport, ont constaté des journalistes de l'AFP.
"C'est complètement chaotique", a déclaré Shaibu Job, un résident d'Abuja empêché de prendre son vol pour Lagos, qui ne se dit pourtant "pas déçu" de l'action syndicale qu'il "encourage à aller plus loin".
"Pas de travail!": devant un bâtiment abritant plusieurs ministères, des syndicalistes encourageaient les salariés à rentrer chez eux.
La présence de soldats et de personnel de sécurité a été renforcée dans les rues.
"Aujourd'hui nous n'avons rien fait au travail, tout est sur pause, je n'ai pas d'électricité chez moi et très peu de stations-service fonctionnent", a expliqué à l'AFP Charles, 53 ans, fonctionnaire à Abuja contraint de travailler comme chauffeur de taxi en dehors de ses heures de travail pour joindre les deux bouts.
Dans la mégalopole de Lagos, un journaliste de l'AFP a constaté que le tribunal du travail était fermé, et que les enfants rentraient chez eux à pied après avoir appris que leurs écoles étaient fermées.
"Les travailleurs nigérians, qui sont l'épine dorsale de l'économie de notre pays, méritent des salaires justes et décents qui reflètent les réalités économiques actuelles", avaient déclaré les syndicats dans un communiqué publié vendredi.
A Kano, la ville la plus peuplée du nord du pays, les bureaux du gouvernement ont gardé portes closes, tout comme les écoles publiques.
"Pas d'école, on a la journée libre!", se réjouissaient des enfants dans un quartier de la ville après avoir appris la fermeture de leur établissement.
En février dernier, quelques milliers de Nigérians avaient déjà manifesté contre la hausse du coût de la vie à l'appel des syndicats, sans obtenir gain de cause.
R.Abreu--ESF