Législatives: des dizaines de milliers d'antis-RN attendus dans la rue
Moins d'une semaine après le séisme de la dissolution, les opposants à l'extrême droite vont battre le pavé samedi dans toute la France à l'appel de syndicats, d'associations et de la coalition de gauche du "Nouveau Front populaire" désignée adversaire N.1 par le patron du RN Jordan Bardella en vue des législatives anticipées.
Environ 200 manifestations sont prévues pendant le week-end à l'approche des législatives des 30 juin et 7 juillet et elles commenceront dès samedi matin à Bayonne, Toulon ou Valenciennes. A Paris, le cortège partira à 14H00 pour emprunter le traditionnel itinéraire République-Bastille-Nation. Lyon défilera dimanche.
De source policière, 300 à 350.000 personnes sont attendues, dont 50.000 à 100.000 dans la capitale. 21.000 policiers et gendarmes seront mobilisés.
"Il faut bien entendu que cette journée puisse se dérouler comme on a réussi à le faire sur les retraites, sans violence", a déclaré la N.1 de la CFDT Marylise Léon dans un entretien au Parisien.
Cinq syndicats CFDT, CGT, UNSA, FSU et Solidaires appellent à la mobilisation. FO, CFE-CGC et CFTC mettent en avant leur apolitisme pour ne pas appeler à manifester même si certaines fédérations comme celle de l'éducation chez FO iront défiler.
"Il y a besoin d'un sursaut démocratique", a souligné Mme Léon qui appelle à voter "pour n'importe quelle bannière face au RN".
"Un samedi, au vu de la situation qu’on est en train de vivre en France, il devrait y avoir beaucoup de monde", selon Hervé Aussel, secrétaire général CFDT Haute-Garonne.
- "Très grand danger" -
Les leaders de gauche, qui avaient appelé dès lundi soir à rejoindre les cortèges, pourront y mesurer la popularité du Nouveau Front Populaire, une coalition électorale qui rassemble les principaux partis de gauche des Insoumis à Place publique, le mouvement de Raphaël Glucksmann en passant par le Parti socialiste.
Impensable avant dimanche, leur union a été scellée cette semaine et a abouti à un programme commun, dont le volet économique au même titre que celui du RN, fait courir un "très grand danger" à l'économie française, a jugé vendredi soir le président de la République Emmanuel Macron depuis l'Italie où il participait au sommet du G7.
Cette unité à gauche s'est cependant lézardée vendredi soir tard avec l'annonce de l'investiture par La France Insoumise (LFI) du député sortant du Nord Adrien Quatennens, contesté après avoir été condamné pour violences conjugales.
A l'inverse, des figures historiques du parti comme Danielle Simonnet, Alexis Corbière ou Raquel Garrido, n'ont pas été reconduites. "Une purge", a dénoncé la première, "une punition pour avoir fait entendre des critiques en interne", selon le deuxième. "On me fait payer le crime de lèse-Mélenchon", a encore protesté Mme Garrido.
M. Macron a brocardé les divergences internes à gauche, les qualifiant de "spectacle de grande incohérence": chacun "pense le contraire" de l'autre, "on est chez les fous, ce n'est pas sérieux".
Le "contrat de législature" du Nouveau Front populaire propose "une rupture totale avec la politique d'Emmanuel Macron", selon le coordinateur de LFI Manuel Bompard, avec à la clef abrogation de la réforme des retraites, Smic à 1.600 euros mais aussi lutte contre l'antisémitisme et condamnation des "massacres terroristes du Hamas" commis le 7 octobre en Israël, deux sujets qui ont empoisonné les relations à gauche pendant la campagne des européennes.
- 1er mai 2002 -
"La République est en danger face à ces ingénieurs du chaos qui prônent la division", a estimé vendredi Jordan Bardella en campagne dans le Loiret, en parlant ainsi des "amis de M. Mélenchon".
Le président du RN qui vise Matignon à 28 ans seulement, a estimé que seules "deux formations politiques" pourront "composer un gouvernement": la sienne, favorite des sondages, et cette nouvelle union de la gauche.
Il a également fustigé les manifestations prévues ce weekend: "la démocratie ne se conteste pas au point de refuser le résultat des urnes"
Depuis dimanche, des manifestations et rassemblements ont lieu quasi-quotidiennement, notamment en régions.
Le 1er mai 2002, la qualification de Jean-Marie Le Pen au second tour de l'élection présidentielle, avait rassemblé près d'un million de manifestants, aujourd'hui c'est le "choc des européennes" avec un score cumulé de l'extrême-droite de 37,8% et la perspective d'un "RN au portes du pouvoir" qui poussent les opposants dans la rue.
M. Bardella a dénoncé vendredi des appels "extrêmement dangereux" à "l'insurrection", tout en se disant "très attaché à la liberté d'expression".
Du côté de la droite classique, le tribunal de Paris a provoqué un énième rebondissement en invalidant vendredi la décision du bureau national du parti Les Républicains (LR), qui avait exclu son président Eric Ciotti, favorable à une alliance avec le RN.
M. Bardella assure que son parti présentera "un candidat commun" avec LR "dans 70 circonscriptions".
D'ici à dimanche, date limite du dépôt des candidatures, les partis finalisent leurs castings.
Signe de l'incertitude qui pèse sur le scrutin, la Bourse de Paris a connu sa pire semaine depuis mars 2022 (-6,23%).
D.Torres--ESF