Le gouvernement français dévoile un projet de budget en terrain miné
Le gouvernement français dévoile jeudi son projet de budget pour 2025, un exercice à haut risque tant l'effort prévu pour réduire le vertigineux déficit français est massif et que l'Assemblée nationale fragmentée lui est hostile.
Revalorisation des pensions reportée, postes de fonctionnaires supprimés, exonérations de charges patronales abaissées ... L'exécutif détaillera comment il compte trouver 60 milliards d'euros dans le projet de loi de finances (PLF) et de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour redresser des finances publiques à la dérive.
Malgré une levée de boucliers jusqu'en son sein sur les économies et les hausses d'impôts envisagées, il ambitionne un effort partagé pour éloigner la menace d'une "crise financière" et préserver la crédibilité française auprès des marchés financiers et de l'UE, qui a épinglé Paris pour ses déficits excessifs.
Préparé "en extrême urgence" et présenté avec un retard inédit dans un calendrier bousculé par les législatives anticipées, le projet de budget prévoit de réaliser deux tiers de l'effort, soit quelque 40 milliards d'euros, grâce à des réductions de dépenses.
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L'Etat sera le plus gros contributeur, à hauteur de 20 milliards d'euros. Les fonctionnaires sont dans le viseur, tandis que les ministères devront fournir 5 milliards d'économies, outre un gel de leurs crédits.
La sécurité sociale doit dégager 15 milliards, notamment via le report décrié de six mois, au 1er juillet, de l'indexation des pensions (pour 4 milliards).
Les aides à l'embauche d'apprentis subiront un coup de rabot, comme les allègements de charges. Cette hausse du coût du travail est décriée par le Medef, première organisation patronale, qui y voit une menace pour la compétitivité des entreprises françaises et des "centaines de milliers d'emplois".
Il est également envisagé de transférer vers les complémentaires santé une fraction des remboursements de consultations médicales et de rogner la participation de l'Assurance maladie au financement des arrêts maladie.
Les collectivités locales sont priées de participer à l'effort pour 5 milliards d'euros, accusées par le précédent gouvernement d'avoir laissé s'envoler leurs dépenses. Elles espèrent pouvoir infléchir cette ponction lors du débat parlementaire.
Des hausses d'impôts sont par ailleurs prévues pour 20 milliards d'euros. Un revirement opéré au nom de la "justice fiscale", après sept ans de baisse offensive de la fiscalité, dans un pays encore champion des prélèvements obligatoires et des dépenses.
Les 65.000 foyers fiscaux les plus fortunés (soit 0,3% du total) s'acquitteront d'une surtaxe "exceptionnelle" qui porterait leur taux minimal d'imposition à 20%. Et 300 entreprises dont le chiffre d'affaires dépasse un milliard d'euros paieront plus que le taux de 25% de l'impôt sur les sociétés, pendant un an ou deux.
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Les transports polluants paieront également leur écot, avec un malus écologique durci voire une taxe sur le secteur aérien, tandis qu'après une baisse énorme durant la crise inflationniste, une taxe sur l'électricité (TICFE) serait relevée drastiquement.
Se défendant de tout "choc fiscal", le Premier ministre Michel Barnier a promis d'épargner "les plus fragiles" et "ceux qui travaillent".
Après un dérapage attendu à 6,1% cette année, l'objectif est de ramener le déficit public à 5% dès 2025, pour revenir en 2029 sous la limite de 3% tolérée par Bruxelles.
La dette, à 3.228,4 milliards d'euros fin juin (112% du PIB), a gonflé d'un millier de milliards depuis l'arrivée d'Emmanuel Macron à la présidence en 2017, lestée par le coût des crises et de recettes fiscales récentes qui ont été décevantes. Elle frôlera 115% l'an prochain, presque le double du maximum fixé à 60% par Bruxelles, avant de décroître progressivement.
Le chemin de croix budgétaire s'avère d'autant plus ardu qu'il se greffe sur une grande instabilité politique.
Le gouvernement se dit ouvert au dialogue avec les parlementaires mais, fragmentés en trois blocs, les députés sont réticents aux concessions. En conséquence, le budget pourrait être adopté sans vote, via l'article 49.3 de la Constitution.
P.Avalos--ESF