France: les chiffres d'une croissance dégradée fin 2024 annoncés jeudi
L'Insee dévoile jeudi les chiffres de la croissance française au quatrième trimestre 2024, attendue en net ralentissement dans une France plongée dans une crise budgétaire et privée du regain d'activité qu'aurait pu insuffler le repli marqué de l'inflation.
L'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) table sur une croissance nulle au quatrième trimestre 2024 après une hausse de 0,4% au troisième trimestre attribuable aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris.
Sur l'ensemble de l'année 2024, l'Insee estime que le produit intérieur brut (PIB) a progressé de 1,1%, comme en 2023. C'est mieux que l'Allemagne, en récession pour la deuxième année d'affilée avec une contraction de 0,2% du PIB, mais bien moins que l'Espagne, où la croissance économique a atteint 3,2%.
En France, "il est difficile de trouver un poste (du PIB) qui se porte très bien", euphémise Maxime Darmet, économiste chez Allianz, interrogé par l'AFP.
- Incertitude -
Il pointe du doigt la faiblesse de la production industrielle - à l'exception de l'aéronautique - et une consommation des ménages sans éclat malgré le recul à +2% de l'inflation en 2024 en moyenne annuelle, contre +4,9% l'année précédente. Dynamisés par les JO, les services subiraient "un contrecoup".
En décembre, l'Insee tablait sur une augmentation de la consommation de 0,9% en 2024, moins que le pouvoir d'achat (+2,1%). Les ménages, qui ne perçoivent pas encore l'assagissement des prix, ont préféré épargner, sur fond de craintes concernant le chômage.
L'incertitude politique qui agite la France depuis la dissolution de l'Assemblée nationale en juin pèse sur la croissance et se double d'une crise budgétaire: le pays est sans budget pour 2025 à cause de la chute du gouvernement Barnier en décembre.
Signe de la confiance ébranlée des investisseurs, l'écart entre les taux d'emprunt français et allemand à 10 ans s'est creusé. Le taux français dépasse maintenant ceux de l'Espagne et du Portugal, naguère mauvais élèves de la zone euro.
Cette situation vient "en partie annihiler" la baisse des taux d'intérêt amorcée en juin par la Banque centrale européenne (BCE) et qui pourrait se poursuivre jeudi, après des relèvements destinés à faire baisser l'inflation, souligne Maxime Darmet.
- Discussions houleuses -
Le début 2025 s'annonce morose également, dans un environnement international difficile, où le président américain Donald Trump brandit la menace de droits de douane accrus.
En France, le nouveau gouvernement de François Bayrou ambitionne de réaliser plus de 50 milliards d'euros d'effort budgétaire cette année pour ramener le déficit public à 5,4% du PIB, contre environ 6% en 2024. Mais les négociations pour s'accorder avec les socialistes sur un budget de "compromis" sont houleuses, faisant toujours planer le risque d'une censure.
"La confiance dégradée et l'incertitude entourant le budget 2025 continuent de peser sur la demande intérieure et cela risque de perdurer dans les prochains mois", souligne Charlotte de Montpellier, économiste chez ING, dans une note.
Le gouvernement a abaissé sa prévision de croissance de 1,1% à 0,9% pour 2025. De son côté, l'Insee table sur une hausse de 0,2% du PIB aux premier et deuxième trimestres, horizon de ses prévisions.
Le reflux de l'inflation se poursuivrait - l'Insee la voit à 1% sur un an en juin et le gouvernement à 1,4% en moyenne sur l'année - tandis que la facture d'électricité de la plupart des ménages baissera en moyenne de 15% au 1er février.
Cependant, la demande devrait rester "déprimée", affectée notamment par des dépenses publiques plus restreintes: "la consommation n'accélérerait pas" et l'investissement des entreprises baisserait encore de 2%, avance Stéphane Colliac, économiste chez BNP Paribas, dans une note.
M.Ortega--ESF