Tourisme : recruter et former d'ici l'été, un énorme défi en France
Recruter et former le personnel pour avoir des équipes complètes d'ici l'été est la préoccupation principale des hôteliers et restaurateurs français, confrontés à une pénurie de personnel à quelques semaines d'une saison touristique prometteuse.
"Les indicateurs sont au vert", constate Jean-Virgile Crance, président du Groupement national des chaînes hôtelières en France, première destination touristique mondiale.
Il prédit une "belle saison 2022", portée par une clientèle à "plus de 70%" française, a-t-il commenté dans un entretien à la télévision BFM Business.
"Le désir de voyager est beaucoup plus fort que nous ne l'envisagions il y a 5-6 mois. Les hôtels, je l'espère, seront totalement pleins cet été", affirme de son côté le président du groupe hôtelier Accor, Sébastien Bazin.
Côté recrutement de personnel, "il faut que nous attirions encore un certain nombre de gens qui ne sont pas revenus, pour plein de raisons légitimes (...) il nous manque 15 à 20% des talents dans les hôtels", a-t-il calculé.
De fait les "difficultés à embaucher" sont la "principale inquiétude de nos professionnels, en tout cas pour ce qui est des saisonniers", constate M. Crance.
Certains, faute d'avoir réussi à former des équipes assez étoffées pour offrir un service 7 jours sur 7, devront fermer un ou deux jours par semaine, dit-il.
Alors que la saison estivale approche, certains professionnels optent pour des opérations séduction : Louvre Hotels Group, filiale du groupe chinois Jin Jiang, organise ainsi jeudi une journée nationale de recrutement dans huit métropoles, pour pourvoir 200 postes.
Quelque 80 collaborateurs accueilleront les candidats avec "un café gourmand" et leur feront découvrir les emplois à pourvoir : réceptionniste, cuisinier, adjoint de direction...
"Nous voulons montrer que nous recrutons des profils très divers, en reconversion, sans expérience ou éloignés de l'emploi, et qu'il y a des opportunités de carrière extraordinaires dans le secteur", dit Laura Benoumechiara, une responsable des ressources humaines.
Le groupe, qui a déjà mis en place un 13e mois de salaire et l'intéressement, expérimente la semaine de quatre jours pour fidéliser ses collaborateurs.
– "Flexibilité des horaires" –
Ces besoins accrus en personnel font le succès des plateformes spécialisées telles qu'Extracadabra, Bruce, Brigad ou StaffMe, qui promettent aux professionnels une mise en relation avec des extras aux profils "vérifiés".
Élise, 30 ans, travaille comme barmaid mixologue depuis sept ans : auto-entrepreneure après avoir été salariée, elle fait deux à trois missions par semaine grâce aux applications et gagne 900 à 1.500 euros mensuels, ce qui finance ses études d'histoire de l'art. Elle dit apprécier "la liberté, la flexibilité des horaires" qu'offrent les applications de mise en relation.
"Je suis très sélective : je ne travaille que dans Paris, que la nuit, et comme je commence à avoir de la bouteille, je prends les missions les mieux payées, j'ai fait de l'événementiel, des festivals, des salons sympas", dit-elle à l'AFP.
Avoir un contrat fixe ne l'intéresse pas, précise Élise, car ces emplois s'avèrent moins bien payés. "Au niveau salaire, ils n'ont vraiment rien fait depuis la fin du Covid", dit-elle.
Le revers de la médaille est la précarité : après s'être blessée, faute de revenus pendant ses deux semaines de convalescence, elle a dû reprendre le travail avant d'être totalement remise.
Si dans la capitale la pénurie de main d'œuvre est aigüe, c'est aussi le cas en Provence-Alpes-Côte d'Azur (sud de la France), où la région a débloqué un million d'euros pour former en ligne un millier de personnes.
En parallèle a été signée une "charte de bienveillance" où les professionnels s'engagent à améliorer le bien-être au travail avec des horaires moins contraignants, des jours de repos consécutifs, et une politique salariale "motivante".
Entamée fin février, une négociation entre patronat et syndicats de salariés de l'hôtellerie restauration doit apporter des progrès en matière de couverture sociale notamment, après une hausse salariale de 5% entrée en vigueur en avril.
C.Aguilar--ESF