L'économie française a refleuri au deuxième trimestre, mais l'inflation menace toujours
Les nuages de la récession sont dissipés, pas ceux de l'inflation: la France a enregistré une nette croissance de 0,5% au printemps, mais la hausse des prix continue à peser sur la consommation.
La première estimation du produit intérieur brut (PIB) au deuxième trimestre, publiée vendredi par l'Insee, devra certes être confirmée fin août.
Mais alors que la croissance au deuxième trimestre était attendue à 0,2% par la Banque de France et à 0,25% par l'Institut national de la statistique, elle s'est finalement établie à 0,5% par rapport au premier trimestre.
"C'est une bonne surprise, mais il faut regarder les détails", a réagi auprès de l'AFP Ana Boata, directrice de la recherche économique chez Allianz Trade.
Elle s'inquiète notamment de la faiblesse persistante de la consommation des ménages, qu'elle attribue aux tensions sur le pouvoir d'achat liées à la forte inflation.
L'indice des prix à la consommation, dont l'Insee a publié vendredi matin une première estimation pour le mois de juillet, vient d'ailleurs de franchir la barre des 6% (+6,1% sur un an après +5,8% en juin).
- Commerce extérieur -
"Le fait que la consommation soit encore en baisse malgré une politique de soutien généreuse est révélateur", a commenté sur Twitter Gilles Moëc, chef économiste du groupe Axa.
Malgré les dizaines de milliards de dispositifs d'aides aux entreprises et aux ménages déployés par le gouvernement, le soutien budgétaire "peine à compenser l'érosion des revenus réels et/ou la perte de confiance des consommateurs dans un environnement difficile", a-t-il ajouté.
En dehors de cette inquiétude, la bonne tenue de l'économie française au deuxième trimestre s'explique par une contribution nettement positive du commerce extérieur à la croissance.
Selon cette première estimation des comptes nationaux, les importations ont reculé de 0,6% au deuxième trimestre, tandis que les exportations ont bondi de 0,8%.
Ces dernières ont été "tirées notamment par les services de transport (+6,3% après +5,0% au premier trimestre) et les dépenses des voyageurs étrangers en France (+8,6% après +5,0%)", détaille l'Insee.
"À l’inverse, les exportations de biens se replient (-0,6% après +1,4%), notamment dans les matériels de transport et l’agroalimentaire", précise encore l'institut.
"La baisse des importations signifie que la hausse de la demande globale (extérieure et intérieure) ce trimestre a été satisfaite par une hausse de la production et non par une hausse des importations, et c’est en ce sens qu’elle contribue à la croissance du PIB", explique l'Insee.
- Contexte "volatil" -
Quant à la consommation, traditionnel moteur de l'économie française, elle reste négative pour les achats de biens (-1,3%), mais les achats de services repartent nettement à la hausse (+1,5%). Deux tendances contradictoires qui aboutissent à un recul global de 0,2% de la consommation des ménages au deuxième trimestre.
"La consommation de biens et services sur le territoire est notamment soutenue par les dépenses des voyageurs étrangers en France", note l'Insee.
Avec les chiffres publiés vendredi, l'institut évalue à 2,5% l'acquis de croissance de l'économie française pour l'année 2022.
Un chiffre "confortable", estime Ana Boata, et conforme à l'anticipation de croissance annuelle du gouvernement. La Banque de France ou le FMI (+2,3%) sont légèrement moins optimistes.
Mais entre la guerre en Ukraine et l'inflation qui atteint des niveaux plus vus depuis les années 1980, le contexte économique promet de rester "volatil" d'ici à la fin de l'année, avertit Ana Boata.
Les données de l'Insee sont publiées au lendemain de la parution des chiffres de la croissance américaine au deuxième trimestre (-0,9% en rythme annualisé après -1,6% au 1er trimestre), qui ont techniquement fait entrer le pays en récession.
En Europe, les estimations de croissance de la zone euro et de plusieurs grands pays du Vieux Continent doivent aussi être dévoilées vendredi matin.
En Espagne, la croissance a fortement rebondi au deuxième trimestre pour atteindre 1,1%. Et l'inflation s'est encore accélérée en juillet pour atteindre 10,8% sur un an, soit un record "depuis septembre 1984", selon l'Institut national de la statistique (INE) espagnol.
S.Elizondo--ESF