Nouvelles frappes sur Kiev et d'autres villes d'Ukraine avant la reprise de pourparlers
Délégations russe et ukrainienne doivent reprendre leurs pourparlers mardi, alors que les frappes russes se multiplient à Kiev même et que l'armée russe élargit son offensive à tout le pays, au 20e jour de son invasion de l'Ukraine.
Deux personnes ont été retirées mortes et 27 autres ont pu être dégagées saines et sauves d'un immeuble d'un quartier ouest de la capitale, Sviatochine. Le bâtiment de 15 étages s'est embrasé mardi après avoir été touché par une frappe, selon les services de secours ukrainiens.
"A 04H20, tout tremblait très fort. Je me suis levée, ma fille a accouru et m'a demandé, +Tu es vivante?+. Mais dans une des chambres, on n'arrivait pas à dégager mon gendre et mon petit-fils, alors on a cassé les portes, ils ont pu sortir", a indiqué à l'AFP Lioubov Goura, 73 ans, qui résidait au 11e étage, juste après que les secours l'ont ramenée au sol.
Devant une maison, un cadavre enveloppé dans un sac plastique noir gisait au sol.
Un autre immeuble de neuf étages a été touché dans le quartier nord-ouest de Podil, plus proche du centre-ville. Une personne a été prise en charge et hospitalisée, selon les secours.
Le maire de la ville, Vitali Klitschko, a décrété un couvre-feu pour 36 heures à partir de mardi 20 heures (18H00 GMT).
Kiev, que les forces russes tentent d'encercler, s'est vidée d'au moins la moitié de ses quelque trois millions habitants depuis le début du conflit le 24 février.
Mais elle devait accueillir mardi les Premiers ministres polonais, tchèque et slovène, partis en train pour rencontrer le président ukrainien Volodymyr Zelensky et le Premier ministre Denys Chmygal, selon un communiqué de la présidence polonaise.
L'objectif de cette visite est de "réaffirmer le soutien sans équivoque de l'ensemble de l'Union européenne à la souveraineté et à l'indépendance de l'Ukraine, et de présenter un vaste ensemble de mesures de soutien à l'État et à la société ukrainiennes".
- Visite à Kiev
Cette visite, la première annoncée de dirigeants étrangers à Kiev depuis le début de la guerre, intervient alors que doivent reprendre mardi des pourparlers russo-ukrainiens, interrompus la veille. Le Kremlin a indiqué ne faire "aucun pronostic" quant à leur issue.
Les discussions se déroulent par visioconférence après trois rounds en présentiel au Bélarus voisin puis une rencontre jeudi en Turquie des chefs des diplomaties russe et ukrainienne.
Dans la nuit, le président Volodymyr Zelensky a lui assuré que les Russes ont "commencé à comprendre qu'ils n'arriveront à rien par la guerre".
"On m'a dit que (les pourparlers en cours) étaient plutôt bons", a indiqué le chef de l'Etat, après avoir évoqué samedi une approche nouvelle, "fondamentalement différente", de Moscou dans les négociations. "Mais attendons de voir".
Son homologue russe Vladimir Poutine avait aussi évoqué vendredi des "avancées" dans les discussions.
Mais la Russie a aussi élargi son offensive à l'ensemble du pays.
Le Kremlin a même évoqué lundi "la possibilité de prendre sous contrôle total (les) grandes villes qui sont déjà encerclées".
Depuis vendredi, les combats ont gagné l'ouest du pays. Une frappe lundi contre une tour de télévision près de Rivne (nord-ouest) a fait 19 morts et neuf blessés, selon les autorités locales.
Et la grande ville de Dnipro (est), restée relativement épargnée jusqu'ici, a vu mardi son aéroport bombardé, avec des "destructions massives", selon son maire, qui n'a pas évoqué de victimes dans l'immédiat.
Dans le sud du pays, les Russes tentent toujours de prendre Marioupol, ville portuaire stratégique sur la mer d'Azov, assiégée depuis des jours.
Mais selon l'état-major ukrainien, ils auraient perdu 150 soldats dans l'offensive et "battu en retraite". Des informations invérifiables de source indépendante.
Un convoi d'aide humanitaire, qui cherche depuis des jours à atteindre la ville, a de nouveau été bloqué lundi par des soldats russes à Berdiansk, à 85 km de Marioupol, selon les autorités ukrainiennes. Quelque 160 voitures ont néanmoins pu quitter la ville, où des milliers d'habitants vivent terrés dans des caves, privés d'eau, d'électricité, de chauffage et de nourriture.
Plus de 2,8 millions de personnes ont fui l'Ukraine depuis le début de l'invasion, selon un décompte lundi de l'ONU, qui recense aussi environ 2 millions de déplacés à l'intérieur du pays.
- Irruption télévisée
En Russie, dans un rare moment de protestation publique, une femme, identifiée par l'ONG OVD-Info comme Marina Ovsiannikova, a fait irruption lundi soir sur le plateau d'une grande chaîne de télévision russe avec une pancarte critiquant l'offensive en Ukraine.
"Non à la guerre. Ne croyez pas la propagande. On vous ment ici", pouvait-on lire sur sa pancarte.
La vidéo de l'incident est devenue virale sur les réseaux sociaux, de nombreux internautes saluant un "courage extraordinaire".
L'utilisation du mot "guerre" par des médias ou des particuliers pour décrire l'intervention russe en Ukraine est désormais passible de poursuites et de lourdes peines. Les autorités russes parlent elles d'"opération militaire spéciale".
La protestataire a été arrêté. Le Kremlin a dénoncé un acte de "hooliganisme"
- Yacht bloqué -
Enfin, un quatrième train de sanctions de l'Union européenne devait entrer en vigueur, incluant des mesures contre l'accès aux marchés, les exportations de biens de luxe ou l'appartenance à des institutions financières internationales.
Un yacht d'un oligarque russe d'une valeur de près de 128 millions d'euros a en outre été immobilisé lundi à Barcelone (Espagne) dans le cadre de ces sanctions, selon le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez. "Et d'autres sont à venir", a-t-il prévenu.
Selon le quotidien espagnol El Pais, il s'agit du navire Valérie, lié à Sergueï Tchemezov, patron du conglomérat russe de l'industrie de défense Rostec, et allié de M. Poutine.
Les trains de sanctions occidentales précédents ont déjà gelé quelque 300 milliards de dollars de réserves russes à l'étranger, qui pourraient empêcher la Russie d'honorer plusieurs échéances de paiement de dettes en devises étrangères en mars-avril.
La Russie a accusé lundi l'Occident de vouloir ainsi provoquer un défaut de paiement "artificiel" par ses sanctions.
Les cours du pétrole, qui avaient flambé depuis le début de l'invasion russe, sont repartis à la baisse.
Lundi, le petit espoir suscité par les pourparlers les avait poussés à la baisse. Mardi, le baril de brut WTI - référence du pétrole américain - est même repassé sous la barre des 100 dollars, cette fois sur fond d'inquiétudes d'un ralentissement de l'économie chinoise à cause des mesures drastiques annoncées par Pékin face à une recrudescence des cas de Covid-19 dans le pays.
burx-cat/pz
V.Abaroa--ESF