A Mykolaïv, l'accalmie brisée par une frappe meurtrière
La frappe a éventré l'imposant bâtiment de l'administration régionale de Mykolaïv, laissant en son centre un énorme trou béant. Après plusieurs jours d'accalmie, l'attaque russe a surpris mardi au petit-déjeuner la population de cette ville clé du sud de l'Ukraine.
Dans le chaos de gravats au pied de l'édifice, les sauveteurs tentent d'extraire les victimes et d'improbables survivants.
Au moins sept personnes ont été tuées et 22 autres blessées, a annoncé le président ukrainien Volodymyr Zelensky.
Des journalistes de l'AFP ont vu deux corps évacués, ceux d'un homme en uniforme et d'une femme âgée.
L'attaque a rompu une relative accalmie dans cette ville qui commande la route d'Odessa, le plus grand port ukrainien, dans le sud-ouest du pays.
Depuis plusieurs jours déjà, la ligne de front s'est déplacée vers le sud-est, autour de Kherson, la seule ville importante dont la Russie a revendiqué la prise totale depuis le début de l'invasion le 24 février, désormais visée par une contre-offensive ukrainienne.
- "Se venger de la résistance" -
Dans le complexe d'habitations jouxtant le siège de l'administration secoué par l'explosion, des habitants, certains encore en pyjama ou en chemise de nuit, se donnent des nouvelles et constatent les dégâts.
Dans la cour commune à cet ensemble d'immeubles, une femme en peignoir turquoise demande à ses voisins s'ils ont vérifié leur toiture.
Plus près du bâtiment visé, Yelena Dolguikh, 65 ans, en pantoufles, avec son petit chien et sous le bras un sac en plastique contenant des documents.
"J'étais en train de préparer le petit-déjeuner", raconte-t-elle, "je suis descendue comme j'étais, j'ai juste pris mes papiers et emmené mon chien avec moi".
Une jeune femme, Svetlana Fedorenko, s'est coupé la main en ramassant le verre brisé de son balcon et de son salon cuisine, mais assure avoir "connu pire".
"Poutine est un salaud, un point c'est tout", assène Viktor Gaïvonenko, un voisin venu l'aider à nettoyer les débris, au sujet du président russe Vladimir Poutine.
"Poutine vise Zelensky et le gouverneur Kim parce qu'ils remontent le moral de la population et de nos soldats", estime Svetlana Fedorenko.
"Il veut se venger de la résistance de Mykolaïv qui l'empêche de marcher sur Odessa", ajoute-t-elle.
Les Russes "ont compris qu'ils ne pourraient pas prendre Mykolaïv et ont décidé de me dire bonjour, de nous dire bonjour à tous", a ironisé le gouverneur, précisant que son bureau avait été touché.
"C'est effrayant. Nous avons eu de la chance ici, nous n'avons pas eu autant d'explosions dans le centre de la ville" que dans d'autres régions d'Ukraine, déclare Donald, un retraité canadien de 69 ans résidant dans le quartier.
La veille, Mykolaïv célébrait le 78e anniversaire de sa libération par l'Armée rouge. Sur l'avenue centrale, le "monument aux tankistes libérateurs", sur lequel trône un char soviétique T-34/85 de la Deuxième guerre mondiale, venait d'être refleuri.
"C'est le jour de la libération de Mykolaïv des envahisseurs fascistes. Et maintenant nous sommes en train de libérer la région des envahisseurs russes", soulignait Vitaly Kim, dans une vidéo sur les réseaux sociaux.
Il disait néanmoins espérer que les pourparlers russo-ukrainiens mardi en Turquie "seront fructueux".
"Nous avons chassé les nazis en 1944, nous ne laisserons aucune chance aux fascistes russes en 2022", renchérissait dans un communiqué lundi soir le ministère ukrainien de la Défense en référence à ce 78e anniversaire, promettant aux envahisseurs "une mort sans gloire".
C.Aguilar--ESF