Le blocage persiste à gauche sur Matignon, Macron et Attal affinent leur stratégie
Incapable de s'accorder sur un candidat pour Matignon, la gauche peinait lundi à surmonter ses divergences: les Insoumis fustigent "l'opposition systématique" des socialistes, qui envisagent désormais de se tourner vers la société civile, tandis que Gabriel Attal et Emmanuel Macron réunissent leurs troupes pour affiner leur stratégie.
En attendant la mise en place de la nouvelle législature et l'élection très attendue du prochain président de l'Assemblée nationale, jeudi, le président de la République a reçu à la mi-journée les chefs de parti du camp présidentiel à l'Elysée, parmi lesquels Stéphane Séjourné (Renaissance) ou encore Marc Fesneau, représentant du président du MoDem François Bayrou.
Juste avant, c'est Gabriel Attal, fraîchement élu chef des députés macronistes, qui a réuni en visioconférence le groupe Renaissance, bientôt rebaptisé "Ensemble pour la République".
Arrivé en tête des législatives, le Nouveau Front populaire n'a, de son côté, toujours pas trouvé d'accord sur une équipe gouvernementale.
Le nom d'Huguette Bello, présidente de La Réunion proche de La France insoumise, n'a pas convaincu le PS et la piste a été abandonnée durant le week-end... Et cela commence à agacer, après huit jours de négociations infructueuses.
"Je suis tellement en colère du visage que nous montrons", s'est désespérée lundi sur X l'écologiste Sandrine Rousseau.
Les tensions les plus fortes opposent Insoumis et socialistes, les deux principaux groupes du NFP se disputant le leadership à gauche du nouvel hémicycle.
"Si ça bloque aujourd'hui, c'est la faute du Parti socialiste, clairement", a lancé le coordinateur de LFI Manuel Bompard, dénonçant sur RMC et BFMTV "les oppositions systématiques, les blocages, les veto" émanant selon lui du PS "sur toutes les candidatures".
"Rien n'a été bloqué", répond de son côté le premier secrétaire du PS Olivier Faure, candidat officiel des socialistes pour Matignon.
- Cap sur le perchoir -
Pour sortir de l'ornière, le député de Seine-et-Marne a proposé sur France 2 "d'élargir" le prisme à "quelqu'un de l'extérieur". "Il faut chercher à trouver la personnalité, peut-être issue de la société civile, qui permettra d'avancer ensemble", a-t-il expliqué, sans toutefois citer de nom. Cela "peut être une solution", a abondé la sénatrice écologiste Mélanie Vogel sur BFM.
Les Insoumis, de leur côté, ont érigé une autre priorité pour le NFP: s'accorder sur une candidature commune au poste de président de l'Assemblée.
"De cette élection à l'Assemblée nationale va dépendre la suite", a insisté sur TF1 la députée insoumise du Val-de-Marne Clémence Guetté.
La gauche joue gros sur cette élection au perchoir: une partie du camp macroniste tente en effet depuis plusieurs jours de bâtir une majorité alternative au NFP pour ce poste-clé, que Yaël Braun-Pivet entend bien conserver.
Un accord avec la droite, par exemple, pourrait permettre au bloc présidentiel de dépasser la gauche en nombre de voix.
Mais une autre candidature pourrait rassembler largement: celle du centriste Charles de Courson. Cet ex-représentant du groupe indépendant Liot, qui a ferraillé contre la réforme des retraites, a promis, s'il avait le poste, d'être le "garant (du) bon fonctionnement" de l'Assemblée dans une "période inédite et chaotique".
- Attal bientôt démissionnaire -
La question du front républicain contre le Rassemblement national, que la gauche aimerait poursuivre à l'Assemblée nationale en privant le RN de tout poste à responsabilité, est également l'un des sujets de la semaine.
Mais plusieurs cadres macronistes, dont Mme Braun-Pivet, y sont opposés, dans le sillage des législatives de 2022, après lesquelles le RN avait obtenu deux vice-présidences de l'Assemblée, notamment.
Ce dossier du front républicain était à l'ordre du jour de la réunion matinale du groupe Renaissance autour de Gabriel Attal, dont les conclusions n'ont pas filtré.
En attendant, M. Attal reste toujours Premier ministre, tant qu'Emmanuel Macron n'accepte pas sa démission.
Cela devrait être le cas "mardi ou mercredi", a glissé lundi le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin. L'équipe actuelle resterait toutefois un certain temps en place, notamment pendant la période très sensible des JO, pour gérer les "affaires courantes". Un conseil des ministres, prévu mardi à 11H30, pourrait ouvrir la voie à cette nouvelle configuration.
Au coeur du flou politique, une chose est certaine pour la future équipe gouvernementale: elle récupérera des finances publiques dans le rouge. Dans un épais rapport présenté lundi matin, la Cour des comptes dresse en effet un bilan préoccupant.
La nécessité de réduire la dette est un "impératif" qui "doit être partagé" par toutes les forces politiques, a averti son premier président Pierre Moscovici.
V.Morales--ESF