La Russie toujours aux prises avec une incursion ukrainienne d'ampleur
La Russie a annoncé lundi l'évacuation des habitants d'un district dans la région de Belgorod, frontalière de l'Ukraine et voisine de celle de Koursk, où son armée fait face à une incursion d'ampleur des forces ukrainienne depuis près d'une semaine.
Après des mois de recul face aux soldats russes sur le front Est, l'Ukraine a déclenché le 6 août une opération d'envergure inédite dans la région russe de Koursk, y prenant, selon des analystes, le contrôle de plusieurs localités.
Des "milliers" de soldats ukrainiens participent à cet assaut, selon un haut responsable ukrainien, la Russie assurant de son côté stopper les avancées adverses sur son sol et avoir envoyé des renforts.
"L'objectif est d'étirer les positions de l'ennemi, de lui infliger des pertes maximales, de déstabiliser la situation en Russie (...) et de transférer la guerre sur le territoire russe", a déclaré samedi soir un responsable ukrainien du secteur de la sécurité, s'exprimant auprès de l'AFP sous couvert d'anonymat.
De son côté, l'armée russe a affirmé dimanche avoir frappé les troupes ukrainiennes avec des missiles et de l'artillerie, tout en empêchant des "tentatives de percées" de "groupes mobiles de blindés" ennemis en direction de localités situées à environ 30 kilomètres à vol d'oiseau du territoire ukrainien.
Face à une situation "alarmante", les autorités de la région de Belgorod, attenante à celle de Koursk, ont toutefois annoncé lundi matin l'évacuation des habitants du district de Krasnoïaroujski "pour (leur) sécurité".
"Il y a des activités ennemies" dans la zone, a reconnu le gouverneur de la région de Belgorod, Viatcheslav Gladkov, qui n'a pas précisé combien de civils étaient concernés par cette décision.
Dans la nuit de dimanche à lundi, l'armée russe a dit avoir "détruit" un total de 18 drones d'attaque ukrainiens dans trois régions de l'ouest russe (Koursk, Belgorod et Voronej), sans évoquer d'éventuels dégâts ou blessés.
- Blindés ukrainiens massés -
Si l'armée russe dit infliger de lourdes pertes aux forces ukrainiennes, le gouverneur de la région de Koursk, Alexeï Smirnov, a jugé dimanche la situation "difficile".
Ramzan Kadyrov, qui dirige la région russe de Tchétchénie, avait lui déclaré qu'une unité de ses combattants tchétchènes, considérés comme les soldats les plus brutaux et les plus endurcis du pays, était active dans la région de Koursk.
Des journalistes de l'AFP ont vu dimanche, sur des routes de la région ukrainienne de Soumy (nord), en face de celle de Koursk, des dizaines de blindés ukrainiens.
Ces véhicules, de différents types, sont marqués d'un triangle blanc qui sert manifestement à identifier les troupes prenant part à cette offensive.
Après des jours de silence sur l'opération, le président ukrainien Volodymyr Zelensky en a pour la première fois reconnu l'existence dans son allocution quotidienne samedi soir, expliquant que Kiev cherchait à "déplacer la guerre sur le territoire de l'agresseur".
Face à cette attaque, la Russie a instauré un régime "antiterroriste" dans trois régions frontalières de l'Ukraine, dont celles de Koursk et Belgorod.
- Incendie "éteint" à la centrale de Zaporijjia -
Samedi, elle annonçait avoir évacué de la zone affectée par l'incursion plus de 76.000 personnes. L'Ukraine, pour sa part, a demandé l'évacuation d'au moins 20.000 civils de la région de Soumy.
L'incendie qui s'était déclaré dimanche soir dans le système de refroidissement de la centrale nucléaire ukrainienne à l'arrêt de Zaporijjia, occupée par les forces armées russes, a par ailleurs été "éteint", a assuré lundi un responsable de l'occupation dans le sud de l'Ukraine, Vladimir Rogov.
Kiev et Moscou se sont accusés mutuellement d'être responsable de cet incident.
L'Agence internationale de l'énergie atomique a affirmé qu'"il n'y a pas d'impact sur la sûreté nucléaire", tout en dénonçant une nouvelle fois des "attaques irresponsables qui (...) augmentent le danger d'un accident nucléaire".
La Russie a envahi l'Ukraine en février 2022 et y mène depuis lors une offensive incessante, occupant des pans entiers de l'est et du sud de ce pays et soumettant des villes ukrainiennes à des attaques quotidiennes d'artillerie, de missiles et de drones.
Selon le responsable ukrainien interrogé par l'AFP, l'incursion visait initialement à détourner les forces russes des régions ukrainiennes de Kharkiv et du Donbass (est) pour alléger leur pression sur l'armée de Kiev, moins nombreuse.
Mais, pour l'instant, "leur pression dans l'Est continue. Ils ne retirent pas leurs troupes de cette zone", même si "l'intensité" des attaques russes y a "un tout petit peu baissé".
L'attaque a cependant "pris les Russes au dépourvu" et "a vraiment renforcé notre moral", a poursuivi ce responsable.
Tôt ou tard, la Russie va "arrêter" les unités ukrainiennes dans la région de Koursk mais, si "au bout d'un certain temps, elle n'arrive pas à reprendre ces territoires, ils pourront être utilisés à des fins politiques", par exemple, lors de négociations de paix, a-t-il jugé.
Ce responsable a enfin assuré que les alliés occidentaux de l'Ukraine avaient été prévenus de l'incursion "vu que l'armement occidental est activement utilisé" dans cette opération.
V.Morales--ESF