L'Ukraine veut instaurer une "zone tampon" sur le sol russe
L'Ukraine, qui dit poursuivre mercredi son avancée dans la région russe frontalière de Koursk, veut y créer une "zone tampon" pour protéger sa propre population ainsi que des couloirs humanitaires pour venir en aide aux civils russes.
Depuis le 6 août, les forces de Kiev se sont engouffrées dans la région de Koursk, frontalière de l'Ukraine, prenant les troupes du Kremlin au dépourvu et réalisant la plus grande incursion d'une armée étrangère sur le sol russe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
"Nous continuons de progresser dans la région de Koursk. Depuis le début de la journée, nous avons parcouru entre un et deux kilomètres dans différentes zones", a dit M. Zelensky sur Telegram, tout en faisant état de "plus de 100 militaires russes capturés" ce mercredi.
Appuyée par l'aviation, des drones et l'artillerie, elle a assuré avoir infligé de lourdes pertes aux Ukrainiens. Elle a aussi publié des images montrant cinq individus présentés comme des soldats ukrainiens faits prisonniers et d'autres montrant quatre cadavres de militaires ensanglantés.
De leur côté, les forces ukrainiennes ont utilisé des drones longue portée pour viser quatre aérodromes du centre et de l'ouest de la Russie --à Koursk, Voronej, Savasleïka et Borissoglebsk--, a indiqué à l'AFP une source au sein des services de sécurité à Kiev.
- "Zone tampon" et "couloirs humanitaires" -
Le ministre ukrainien de l'Intérieur, Igor Klymenko, a déclaré que l'Ukraine cherchait à créer "une zone tampon" dans la région de Koursk afin de protéger sa population frontalière des bombardements russes.
En mai, Vladimir Poutine avait également justifié l'offensive du Kremlin contre la région ukrainienne de Kharkiv (nord-est) comme une mesure visant à établir une "zone tampon" pour faire cesser, finalement sans succès, les frappes ukrainiennes dans les régions frontalières russes.
Dans la région russe de Belgorod, voisine de celle de Koursk, l'état d'urgence a été décrété mercredi en raison de bombardements des forces de Kiev.
L'offensive ukrainienne a déjà provoqué le départ de plus de 120.000 habitants, selon les autorités russes. Au moins 12 civils ont été tués et plus de cent blessés, indiquaient lundi les autorités régionales de Koursk, sans fournir de nouveau bilan depuis.
Selon le ministre ukrainien de l'Intérieur, "plus de 20.000 personnes" ont déjà été évacuées dans la région de Soumy, frontalière de celle de Koursk.
L'Ukraine, par la voix d'une vice-Première ministre, Iryna Verechtchouk, a annoncé mercredi que son armée prévoyait d'ouvrir des couloirs humanitaires dans la région de Koursk pour faciliter les évacuations de civils "tant en direction de la Russie que de l'Ukraine".
- Centaines de prisonniers russes, selon Kiev -
Mardi soir, Volodymyr Zelensky a fait état de combats "difficiles et intenses" dans la région de Koursk et affirmé que 74 localités y étaient sous le contrôle de Kiev et que "des centaines" de Russes avaient été faits prisonniers.
Les autorités russes ont, quant à elles, reconnu lundi la perte de 28 localités et des gains territoriaux ukrainiens s'étendant sur une zone de 40 kilomètres de largeur et de douze kilomètres de profondeur.
Selon des calculs réalisés par l'AFP mardi à partir de sources russes relayées par l'Institut pour l'étude de la guerre (ISW), un centre de réflexion américain, les troupes ukrainiennes ont avancé de 800 km2 dans la région de Koursk.
A titre de comparaison, la Russie a progressé de 1.360 km2 en territoire ukrainien depuis le 1er janvier 2024, d'après l'analyse de l'AFP.
Un porte-parole de la diplomatie ukrainienne, Guéorguiï Tykhy, a jugé mardi "absolument légitimes" les opérations de Kiev face à l'occupation par les Russes de près de 20% du pays.
Cette offensive, a-t-il promis, s'arrêtera si Moscou accepte les conditions posées par l'Ukraine.
Or les négociations entre les deux belligérants sont bloquées en raison des exigences de chaque camp, jugées inacceptables par l'autre.
- "Dilemme" pour Poutine -
S'exprimant pour la première fois sur le sujet, le président américain Joe Biden a estimé mardi que cette offensive ukrainienne "crée un vrai dilemme pour (le président russe Vladimir) Poutine".
Après plusieurs mois compliqués sur le front oriental, les troupes ukrainiennes semblent avoir retrouvé un second souffle à la faveur de ce succès inattendu.
Sur le terrain, l'AFP a vu dans la région de Soumy des blindés ukrainiens s'amasser près de la frontière et, dans le sens inverse, un véhicule transportant environ 10 hommes en treillis militaire russe, les yeux bandés et les mains liées.
Dans les rues de Moscou, Olga Raznoglazova dit être "très inquiète". En vacances dans la capitale russe, elle affirme habiter à une trentaine de kilomètres de la centrale nucléaire de Koursk, mais prévoit de rentrer chez elle.
Roman, un Russe de 41 ans travaillant dans la marine marchande, assure lui que seul un "petit groupe de saboteurs" armé par l'Occident et l'Otan s'est introduit dans la région et que l'armée russe "les tuera, et c'est tout".
U.Alonso--ESF