Venezuela: Colombie et Brésil favorables à une nouvelle présidentielle, pas l'opposition ni Maduro
Le Brésil et la Colombie ont appelé jeudi à une nouvelle présidentielle au Venezuela afin de sortir de la crise née de la réélection contestée fin juillet de Nicolas Maduro, une proposition aussitôt refusée par l'opposition, qui revendique la victoire, comme par le président sortant.
La cheffe de l'opposition Maria Corina Machado a immédiatement rejeté les appels à une nouvelle présidentielle. "Proposer de ne pas tenir compte de ce qui s'est passé le 28 juillet (date du scrutin) est pour moi un manque de respect pour les Vénézuéliens (...), la souveraineté populaire se respecte", a-t-elle dit à des médias chiliens et argentins.
L'élection "a eu lieu et la société vénézuélienne s'est exprimée dans des conditions très défavorables. Il y a eu des fraudes et nous avons quand même réussi à gagner", a-t-elle ajouté.
Même son de cloche du côté d'Edmundo Gonzalez Urrutia, le candidat de l'opposition, qui a réaffirmé sur X avoir remporté "à une écrasante majorité" l'élection. "Nous réitérons notre engagement en faveur de la démocratie, de la paix et du Venezuela", a-t-il déclaré.
M. Maduro, qui accuse les deux leaders, vivant dans la clandestinité depuis une quinzaine de jours, de vouloir réaliser un coup d'Etat, n'a pas fait directement référence à un nouveau scrutin, mais a insisté: "Les conflits au Venezuela (...) sont résolus entre Vénézuéliens, avec leurs institutions, avec leur loi, avec leur Constitution".
Le président, qui a saisi la Cour suprême considérée comme inféodée au pouvoir pour "valider" sa victoire, n'a pas non plus voulu réagir aux déclarations venant de l'étranger: "Nous ne pratiquons pas la diplomatie du microphone. Chaque président sait, chaque Etat, chaque pays sait ce qu'il doit faire de ses affaires intérieures".
- "Position absurde" -
Le Conseil national électoral (CNE) a ratifié début août la victoire du président Maduro avec 52% des voix, sans fournir le décompte exact et les procès-verbaux des bureaux de vote, assurant avoir été victime d'un piratage informatique.
Selon l'opposition, qui a rendu publics les procès-verbaux obtenus grâce à ses scrutateurs, son candidat Edmundo Gonzalez Urrutia a remporté le scrutin avec 67% des voix, un résultat rejeté par M. Maduro.
L'annonce de la réélection de ce dernier à un troisième mandat a provoqué des manifestations spontanées, avec un bilan de 25 morts, 192 blessés et 2.400 arrestations, de source officielle.
Jugeant "très claire" la victoire de l'opposition, la Maison Blanche a rectifié le tir après un apparent soutien de Joe Biden à de nouvelles élections.
Le président américain "évoquait la position absurde du (président) Maduro" qui n'est "pas honnête" sur le résultat de la présidentielle, a assuré un porte-parole de la Maison Blanche.
M. Biden avait répondu "je le suis" à la question: "Etes-vous favorable à de nouvelles élections au Venezuela?", lors d'un court échange avec la presse.
Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a évoqué jeudi une nouvelle élection auprès d'une radio locale: si M. Maduro "a du bon sens, il pourrait essayer de lancer un appel au peuple du Venezuela, peut-être même convoquer et programmer" à nouveau une élection.
Son homologue colombien Gustavo Petro a quant lui appelé dans un message posté sur X à une nouvelle élection "libre", suggérant parmi une liste de propositions, la "levée de toutes les sanctions économiques" qui frappent le Venezuela.
De son côté, le Parlement a voté jeudi la loi réglementant les ONG et les associations, la première d'une série que l'opposition juge liberticide.
Parmi les points du texte, l'obligation pour les ONG de notifier leurs "financements" et "donateurs, nationaux ou étrangers", ou l'interdiction de "recevoir des contributions financières destinées à des organisations à but politique".
Le Haut-commissaire de l'ONU aux droits humains, Volker Türk, avait appelé Caracas à ne pas "adopter ces lois et toute autre loi qui porte atteinte à l'espace civique et démocratique dans le pays."
La Commission interaméricaine des droits de l'homme (CIDH) avait estimé que la loi restreignait "arbitrairement le droit d'association, la liberté d'expression".
Deux autres textes sur "l'incitation au fascisme et à la haine" et sur une réglementation des réseaux sociaux doivent être examinés par le parlement monocaméral, où le pouvoir dispose de 256 des 277 sièges après le boycott par l'opposition des législatives de 2020.
A.Amaya--ESF