Elections locales britanniques: l'ampleur du revers se dessine pour Johnson
Le parti conservateur du Premier ministre Boris Johnson, affaibli par les scandales, a essuyé vendredi de lourdes défaites à Londres lors d'élections locales au Royaume-Uni, qui laissent augurer également un tournant historique en Irlande du Nord.
Trou d'air de mi-mandat ou véritable début de la fin pour le dirigeant conservateur, miné par les révélations sur les fêtes à Downing Street et l'envolée des prix ? Si le décompte n'est pas terminé, les conservateurs ont déjà essuyé des pertes chargées de symboles dans la capitale.
L'opposition travailliste a remporté dans la capitale les conseils locaux de Westminster, contrôlé par les Tories depuis sa création en 1964, de Barnet ainsi que Wandsworth, "conseil favori" de l'ex-Première ministre Margaret Thatcher.
En dehors de Londres, le Labour n'obtient pour l'heure que des gains limités, tandis que de plus petits partis, Libéraux-démocrates et Verts, progressent.
Depuis sa circonscription à l'ouest de Londres, Boris Johnson a évoqué des résultat "mitigés". Il a reconnu une "dure soirée" jeudi pour les conservateurs dans certaines régions mais revendiqué une progression dans d'autres.
Selon les résultats encore partiels, les conservateurs perdent huit conseils et près de 150 sièges par rapport à 2018 tandis que le Labour remporte cinq conseils et plus de 90 élus supplémentaires.
- "Partygate" contre "Beergate" -
Bien que marqués traditionnellement par des enjeux très locaux et une faible participation, ces élections doivent notamment permettre de jauger l'étendue des dégâts du scandale des fêtes à Downing Street pendant les confinements, une affaire qui a valu à Boris Johnson d'être sanctionné par une amende.
Au pouvoir depuis 12 ans, les conservateurs se voient aussi reprocher leur soutien insuffisant à des ménages étranglés par l'inflation, qui devrait culminer cette année à plus de 10% selon la banque centrale.
Le président du parti conservateur, Oliver Dowden, s'est efforcé de tempérer, mettant ces "résultats difficiles" dans la droite ligne de ce que l'on peut attendre d'un scrutin qui intervient à mi-mandat.
Il a en tout cas estimé sur Times Radio que le Labour ne dispose pas de l'"élan" nécessaire pour être en position de "former le prochain gouvernement".
La popularité de Boris Johnson, 57 ans dont bientôt trois à Downing Street, s'est effondrée après le "partygate". Il a pour l'instant traversé la tempête, mettant en avant son rôle moteur dans le soutien occidental à l'Ukraine, et se dit déterminé à rester au pouvoir et mener la bataille des prochaines législatives en 2024.
Le Labour, principal parti d'opposition, espère bien tirer profit de ses faiblesses, même si Keir Starmer a lui-même été accusé d'avoir enfreint les règles sanitaires pour avoir partagé bières et currys avec son équipe l'an dernier.
- Risque de paralysie -
Le décompte des voix a en outre commencé vendredi matin en Irlande du Nord, où sont renouvelés les 90 élus de l'assemblée locale de Stormont, et pourrait se prolonger samedi voire au-delà.
Un séisme politique s'annonce: les sondages donnent le Sinn Fein en tête de l'Assemblée locale pour la première fois en cent ans d'histoire de la province britannique, sous tensions depuis le Brexit.
Une victoire du Sinn Fein, l'ex-vitrine politique de l'organisation paramilitaire Armée républicaine irlandaise (IRA), propulserait sa vice-présidente Michelle O'Neill au poste de cheffe du gouvernement local, qui doit être dirigé conjointement par nationalistes et unionistes en vertu de l'accord de paix de 1998.
Elle amorcerait une possible redéfinition du Royaume-Uni: le parti prône une réunification avec la République d'Irlande, même s'il a relégué cette revendication au second plan au profit des questions sociales. Le score du centre non-aligné sera également scruté.
Le risque d'une paralysie politique plane. Le chef des unionistes du DUP, Jeffrey Donaldson, a répété jeudi que sa formation refuserait de participer à un nouvel exécutif si le gouvernement britannique refusait d'agir face aux difficultés posées par les contrôles douaniers post-Brexit, qui selon les unionistes menacent la place de la province au sein du Royaume-Uni.
L.Cabrera--ESF