Philippines: Marcos Junior revendique la victoire à la présidentielle et rend hommage à son père
Ferdinand Marcos Junior, fils de l'ancien dictateur philippin, a revendiqué mercredi via son porte-parole la victoire à l'élection présidentielle, s'engageant à être le dirigeant de "tous les Philippins".
"Au monde, il dit: jugez moi sur mes actes, pas sur mes ancêtres", a ajouté Vic Rodriguez dans un communiqué.
Selon des résultats préliminaires portant sur la quasi-totalité des bureaux de vote, Marcos Junior, surnommé "Bongbong", a obtenu plus de 56% des suffrages et plus de deux fois plus de voix que sa principale rivale, la vice-présidente sortante Leni Robredo.
Cette victoire écrasante marque le retour au pouvoir de la famille Marcos, 36 ans après la révolte populaire qui l'en avait chassée.
L'un des premiers gestes du président élu a été de se rendre sur la tombe de son père, a annoncé mercredi son équipe de campagne.
Marcos Senior est décédé en exil en 1989 et son corps embaumé a été inhumé en 2016 dans le cimetière des héros nationaux à Manille, avec l'aval du président Rodrigo Duterte.
"Le jeune Marcos est reconnaissant au peuple philippin de lui avoir donné une victoire écrasante et à son père, qui a été sa (source) d'inspiration tout au long de sa vie et lui a enseigné la valeur et la signification du véritable leadership", a déclaré l'équipe de Marcos dans un communiqué, décrivant le fils comme le "président en devenir".
Des photos publiées sur les comptes officiels des réseaux sociaux de "Bongbong" le montrent debout devant l'immense tombe, la tête légèrement inclinée et couvrant ses yeux de la main droite, comme s'il pleurait.
Il a déposé un grand bouquet sur la tombe sur laquelle figurent un buste et un portrait en noir et blanc du dictateur.
Une autre photo montre Marcos Jr assis sur une chaise devant la tombe, en train de se recueillir.
Avant son transfert à Manille, la dépouille de l'ex-dictateur était conservée dans une crypte au domicile familial dans la province d'Ilocos Norte dans le Nord des Philippines.
Marcos Jr, 64 ans, a qualifié son père de "génie politique" et ses deux décennies au pouvoir comme une ère de paix et de prospérité pour l'archipel.
- Désinformation -
La campagne électorale de Ferdinand Marcos Jr été marquée par une vaste et souvent abjecte campagne de désinformation, passant sous silence les dizaines de milliers d'opposants arrêtés, torturés ou tués, ou encore les milliards de dollars volés par le clan Marcos dans les caisses du pays pour son enrichissement personnel.
Depuis des années, des comptes pro-Marcos Junior ont envahi les réseaux sociaux, faisant passer auprès des jeunes Philippins les vingt ans de régime de son père (1965-1986) comme une ère dorée.
"Bongbong" est le premier candidat à la présidentielle à remporter la majorité absolue depuis que son père a été renversé en 1986, contraignant sa famille à l'exil aux Etats-Unis.
Le récit du retour en grâce de la famille jadis honnie a éclipsé les questions sur ce que serait un gouvernement Marcos.
En esquivant les débats télévisés et les interviews, le candidat a laissé peu d'indices.
Il sera accompagné de Sara Duterte, fille du président sortant, élue très confortablement lundi à la vice-présidence du pays. Les deux plus hauts mandats du pays seront donc occupés par deux enfants d'anciens chefs d'Etat autoritaires.
Les militants défenseurs des droits humains, les prélats catholiques et les analystes politiques craignent que cette large victoire n'autorise M. Marcos Jr à diriger le pays d'une main de fer.
Les partisans de Leni Robredo, qui voyaient dans le scrutin un moment décisif pour la fragile démocratie philippine, ont été dévastés par sa défaite écrasante.
Ils avaient sillonné l'archipel pendant des mois pour la campagne de la candidate libérale.
Mme Robredo, 57 ans, a reconnu être "clairement déçue" du résultat mais a promis de continuer à se battre contre la mauvaise gouvernance.
M. Marcos devra composer avec cette opposition qui pourrait se transformer en puissant mouvement pro-démocratie.
"Je pense qu'ils pourraient encore être en mesure de contrôler les pires instincts de la future administration Marcos et Duterte", a estimé l'observateur politique Richard Heydarian.
R.Abreu--ESF