L'alliance LR-Macronie se morcelle sur un poste-clé à l'Assemblée
La menace couvait depuis quelques jours : l'accord entre Gabriel Attal et Laurent Wauquiez pour se répartir les postes-clés de l'Assemblée nationale a été ouvertement rompu mercredi sur une présidence de commission, marquant davantage les fractures entre les nouveaux alliés.
Le bras de fer entre les présidents des groupes Ensemble pour la République (EPR) et Droite Républicaine (ex-Les Républicains) a coûté mercredi aux macronistes la présidence de la commission des Affaires économiques, ravie par Aurélie Trouvé (LFI).
Une passe d'arme fratricide qui a échaudé Matignon, à l'heure où se profile l'épreuve du budget. Michel Barnier a fait connaître "sa préoccupation" face à une "solidarité" de ses alliés "qui n'a pas été au rendez-vous", selon son entourage.
Lors d'une réunion du groupe EPR dans l'après-midi, Gabriel Attal a dénoncé un projet "funeste" de Laurent Wauquiez, et une séquence qui vient "fragiliser la confiance" entre les deux camps, selon des participants. Tout en appelant à ne pas tomber "dans un piège" et à se concentrer sur "l'intérêt du pays".
Côté LR on dénonce la gourmandise d'EPR. "EPR a cinq présidences de commission, Horizons une, le MoDem une, LR zéro", a pointé le député LR Julien Dive.
- Accord caduc -
Alliés à couteaux tirés, Gabriel Attal et Laurent Wauquiez avaient pourtant conclu un accord lucratif cet été sécurisant moult postes-clés.
Mais le groupe LR a finalement estimé ne pas être assez bien servi, d'autant qu'il n'est pas assuré de récupérer une vice-présidence laissée vacante par Annie Genevard (LR), entrée au gouvernement.
Et alors que les macronistes tentaient mercredi de conserver les présidences des commissions des Affaires économiques, Affaires étrangères et Affaires sociales, après le départ des précédents présidents au gouvernement, la droite a ouvert un front en présentant deux candidats aux Affaires économiques et aux Affaires étrangères.
Pour cette dernière, la lutte s'est résolue sans verser de sang : le LR Michel Herbillon et la RN Alexandra Masson ont retiré leur candidature au troisième tour, le report des voix faisant élire Bruno Fuchs (MoDem). Aux Affaires sociales la droite n'a présenté personne face au nouveau président Frédéric Valletoux (Horizons).
Mais aux Affaires économiques le troisième tour a viré au règlement de comptes : Julien Dive a retiré sa candidature, mais des LR se sont abstenus et l'un d'eux a voté pour Aurélie Trouvé selon M. Dive.
Pour le grand plaisir du RN, qui a pilonné la droite, Laurent Wauquiez en tête : "Les coups de billard à je ne sais combien de bandes font que LR est maintenant le paillasson de (LFI)", a raillé Laure Lavalette, députée RN.
Pour Richard Ramos (MoDem), ces turbulences sont liées aux ambitions de M. Wauquiez pour 2027 qui conduiront la droite à "sortir assez vite" du jeu gouvernemental, car "sinon ils seront entachés de macronisme".
Eric Bothorel, classé à l'aile gauche d'EPR, est allé plus loin : "Avec le vote des Républicains (...) je n'ai aucun état d'âme à voter la prochaine motion de censure qui sera déposée", a-t-il assuré sur X dans un message illustré d'un fusil.
- Problème socialiste -
L'heureuse élue Aurélie Trouvé s'est elle dite "honorée" de présider une commission couvrant des sujets stratégiques comme l'agriculture, l'énergie, ou le logement. Elle a salué un résultat qui "traduit le vote des Français" aux législatives, où le Nouveau Front populaire (NFP) est arrivé en tête.
Une alliance également traversée de tensions, à l'image de cette situation ubuesque lors de l'élection à la présidence de la commission des Affaires sociales. Le socialiste Jérôme Guedj, frontalement opposé à la direction de LFI et qui ne voulait pas de l'étiquette "NFP" aux législatives, a été choisi comme candidat, au lieu de son camarade Arthur Delaporte.
Mais des bulletins "Arthur Delaporte" ont quand même été déposés dans les urnes, et au dernier tour Jérôme Guedj n'a pas fait le plein à gauche. "Les Insoumis (et des écologistes) préfèrent voter blanc", a-t-il fustigé sur X.
Une source au groupe LFI confirme que des députés ont voté Arthur Delaporte, "au nom du respect du NFP". "Aller chercher des voix à droite sans rassembler la gauche ne fait pas gagner. C'est une leçon pour François Hollande", a soufflé à l'AFP un député PS.
S.Elizondo--ESF