Ukraine: la Russie intensifie ses bombardements, Kiev frappe ses plateformes de forage
L'Ukraine a accusé lundi la Russie d'intensifier encore ses bombardements meurtriers dans l'est, où ses troupes résistent avec acharnement, et selon Moscou a frappé en retour des plateformes de forage en mer Noire au large de la Crimée, annexée en 2014.
Au même moment, au seuil d'une semaine qualifiée d'"historique" par le président Volodymyr Zelensky avec un sommet à Bruxelles qui pourrait accorder à Kiev le statut de candidat à l'entrée dans l'Union européenne, la tension est montée brusquement, plus au nord, entre la Russie et la Lituanie, qui a restreint le transit de fret russe par rail vers l'enclave russe de Kaliningrad.
La Russie a dénoncé un acté "hostile". Si le transit "n'est pas rétabli en totalité, alors la Russie se réserve le droit d'agir pour défendre ses intérêts nationaux", a menacé le ministère russe des Affaires étrangères. Le Kremlin a jugé la situation "plus que sérieuse".
Moscou n'a pas précisé la nature de sa menace, mais Kaliningrad, ancienne cité prussienne de Königsberg annexée en 1945, devenue une enclave russe dans l'Union européenne, est une tête de pont stratégique pour les Russes, qui y ont installé des missiles balistiques Iskander capables de porter des frappes nucléaires en Europe occidentale, et y font mouiller leur flotte militaire.
La Lituanie quant à elle, ex-république soviétique aux relations tendues avec Moscou, est membre non seulement de l'UE mais aussi de l'Otan, qui y positionne des troupes à demeure.
"Nous (...) soutenons fermement nos amis lituaniens", a écrit sur Twitter le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba.
- Plus de bombes -
Pour l'heure, en Ukraine, la présidence a indiqué lundi matin que les bombardements russes augmentaient dans la région de Kharkiv (nord-est), la deuxième ville du pays qui a résisté à la pression des forces russes depuis le début de l'offensive le 24 février.
Dans la région de Donetsk (est), l'intensité des bombardements "s'accroît tout au long de la ligne de front", a ajouté la présidence, faisant état d'un mort et sept blessés dont un enfant
A Severodonetsk, "les Russes contrôlent la plupart des quartiers résidentiels". Mais "si nous parlons de la ville tout entière, plus du tiers de la ville reste contrôlé par nos forces armées", a déclaré le chef de l'administration locale, Oleksandr Striouk.
Les combats font rage autour de cette agglomération clé pour avoir la mainmise sur l'ensemble du Donbass, le bassin industriel de l'est du pays partiellement contrôlé depuis 2014 par des séparatistes prorusses soutenus par Moscou.
Serguiï Gaïdaï, le gouverneur régional, a confirmé à la télévision la chute du village de Metolkine, en périphérie sud-est de Severodonetsk, dont le ministre russe de la Défense avait annoncé dimanche la prise.
"Nous sommes prêts", l'armée ukrainienne "tient le coup" à la veille d'une semaine décisive, avait dit le président Zelensky dimanche soir dans son adresse video quotidienne, soulignant cependant que les forces armées avaient subi "des pertes importantes" face à la puissance de feu de l'artillerie et de l'aviation russes dans la guerre de positions de ces dernières semaines.
- Plateformes pétrolières -
Les Russes de leur côté ont accusé les Ukrainiens d'avoir frappé des plateformes de forage de leur complexe gazier et pétrolier au large de la Crimée, faisant plusieurs blessés et disparus.
"Ce matin, l'ennemi a attaqué les plateformes de forage de Tchernomorneftegaz. Je suis en contact avec nos collègues du ministère de la Défense et (des services spéciaux) du FSB, nous nous efforçons de sauver des gens", a déclaré sur Telegram le gouverneur installé par Moscou après l'annexion en 2014 de la péninsule, Sergueï Aksionov.
Selon lui, 109 personnes en tout se trouvaient sur trois plateformes et 21 d'entre elles en tout ont été évacuées.
Il indique que c'est la première plateforme qui a été le plus durement frappée: "Il y avait 12 personnes dessus, cinq d'entre elles ont été blessées, la recherche des autres se poursuit".
L'armée ukrainienne a frappé à plusieurs reprises avec des missiles de croisière tirés depuis la côte des navires russes en mer Noire, notamment le croiseur Moskva (Moscou), navire amiral de la flotte russe de la mer Noire, coulé à la mi-avril.
La Russie garde cependant le contrôle de cette zone de la mer Noire, ce qui a aussi pour conséquence d'empêcher l'exportation par cargos de millions de tonnes de céréales dont l'Ukraine est un des principaux producteurs mondiaux.
L'Union européenne, par la voix du chef de sa diplomatie Josep Borrell, a accusé lundi Moscou de commettre "un véritable crime de guerre" en bloquant ces exportations "quand le reste de la population mondiale souffre de la faim".
Le gouvernement allemand organise vendredi à Berlin une conférence internationale sur la crise alimentaire liée à cette guerre, en présence notamment du chef de la diplomatie américaine Antony Blinken, a annoncé lundi l'exécutif allemand.
- Quitter le "monde russe" -
Cette guerre pourrait durer "des années", a estimé dimanche dans le quotidien allemand Bild le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, appelant les pays occidentaux à soutenir Kiev dans la durée.
La Suisse, qui accueille les 4 et 5 juillet la première conférence de reconstruction de l'Ukraine, s'attend quant à elle à une reconstruction "longue et complexe", qui devra s'accompagner de réformes.
"La guerre est encore en cours, mais nous savons aussi que le temps viendra d'une reconstruction qui sera longue et complexe", a déclaré le président suisse Ignazio Cassis, lors de la présentation de la conférence de Lugano.
Enfin, en pleine invasion russe et à la veille du sommet de l'UE qui doit décider de lui accorder ou non le statut de candidat, la Rada, le Parlement ukrainien, a ratifié lundi la Convention d'Istanbul, premier traité international à fixer des normes juridiquement contraignantes pour parer les violences sexistes.
"Un événement historique qui nous amènera au sein de l'UE encore plus vite", a applaudi sur Twitter Oleksandr Korniyenko, premier vice-président de la Rada.
"Le président Volodymyr Zelensky et tous les députés qui ont voté en faveur de la ratification ont coupé une énième corde qui avait ancré l'Ukraine au +monde russe+", s'est félicité pour sa part Serguiï Kyslytsya, l'ambassadeur ukrainien à l'ONU.
A.Navarro--ESF