Cinq migrants morts lors d'une tentative massive d'entrée dans une enclave espagnole
Cinq migrants d'origine africaine sont morts, selon les autorités marocaines, lors d'une tentative d'entrée vendredi matin de près de 2.000 d'entre eux dans l'enclave espagnole de Melilla, un nouveau drame migratoire aux portes de l'Union européenne.
"Cinq migrants sont morts dans des bousculades et en tombant de la clôture" qui sépare l'enclave du territoire marocain, ont indiqué les autorités de la province marocaine de Nador dans un communiqué.
Au total, 76 autres migrants ont été blessés, dont 13 grièvement, ainsi que 140 membres des forces de l'ordre marocaines, dont cinq grièvement, lors de "cet assaut, marqué par l'usage de méthodes très violentes de la part des migrants", selon la même source.
Contactée par l'AFP, la Garde civile espagnole, qui surveille l'autre côté de la clôture, a assuré ne pas avoir d'informations sur ce drame, renvoyant vers le Maroc.
La préfecture de Melilla a seulement indiqué pour sa part que 49 agents des forces de l'ordre espagnoles avaient été blessés légèrement vendredi au niveau de la frontière, tout comme 57 migrants à des "degrés divers", dont trois ont dû être pris en charge au sein de l'hôpital de l'enclave espagnole.
Situées sur la côte nord du Maroc, Melilla et l'autre enclave espagnole de Ceuta sont les seules frontières terrestres de l'UE sur le continent africain et font régulièrement l'objet de tentatives d'entrée de la part de migrants cherchant à rejoindre l'Europe.
Cette tentative d'entrée massive a débuté vers 06H40 lorsqu'un groupe de "près de 2.000 migrants (...) a commencé à s'approcher de Melilla", selon la préfecture. "Plus de 500" d'entre eux "provenant de pays d'Afrique subsaharienne" ont ensuite forcé l'entrée du poste frontalier avec "une cisaille", a ajouté la préfecture, selon laquelle 133 sont parvenus à rentrer.
En déplacement à Bruxelles pour un sommet de l'UE, le Premier ministre Pedro Sanchez a dénoncé un "assaut violent" fomenté par des "mafias qui font du trafic d'êtres humains".
Omar Naji, de l'Association marocaine des droits de l'homme (AMDH), a assuré à l'AFP que des "affrontements" avaient eu lieu dans la nuit de jeudi à vendredi entre migrants et agents marocains, et que des blessés de chaque côté avaient dû être hospitalisés à Nador.
- Frontière terrestre de l'UE -
Cette tentative d'entrée massive dans l'une des deux enclaves espagnoles est la première depuis la normalisation mi-mars des relations entre Madrid et Rabat, après une brouille diplomatique de près d'un an.
La crise entre les deux pays avait été provoquée par l'accueil en Espagne du chef des indépendantistes sahraouis du Front Polisario, Brahim Ghali, en avril 2021, pour y être soigné du Covid-19.
Elle avait eu pour point culminant l'entrée en mai 2021 de plus de 10.000 migrants en 24 heures à Ceuta, à la faveur d'un relâchement des contrôles côté marocain. Madrid avait alors dénoncé une "agression" de la part de Rabat, qui avait rappelé son ambassadrice en Espagne.
Pedro Sanchez a mis fin à cette brouille en soutenant publiquement le plan marocain d'autonomie pour le Sahara occidental, ancienne colonie espagnole contrôlée à 80% par Rabat mais revendiquée par le Polisario, soutenu par l'Algérie. Début avril, le roi Mohammed VI l'avait reçu à Rabat pour sceller cette réconciliation.
Pour Madrid, cette normalisation a pour but principal de s'assurer de la "coopération" de Rabat dans le contrôle de l'immigration illégale.
Très critiqué en interne pour son revirement sur le Sahara, M. Sanchez a salué vendredi la "coopération extraordinaire" de Rabat en matière migratoire qui démontre, selon lui, "la nécessité d'avoir la meilleure des relations".
- Chute des arrivées -
Juste avant cette réconciliation, Melilla avait été le théâtre début mars de plusieurs tentatives d'entrée massives dont la plus importante jamais enregistrée dans cette enclave, avec quelque 2.500 migrants. Près de 500 y étaient parvenus ce jour-là.
Le Maroc, d'où partent la majeure partie des migrants vers l'Espagne, a été régulièrement accusé par le passé de les utiliser comme moyen de pression sur l'Espagne.
L'apaisement des relations avec le Maroc a entraîné une baisse récente des arrivées en Espagne.
Selon le ministère de l'Intérieur, le nombre de migrants arrivés dans l'archipel espagnol des Canaries en avril, premier mois ayant suivi la normalisation, a été inférieur de 70% à celui du mois de février.
S.Martinez--ESF