L'UE et l'Iran conviennent d'une reprise bientôt des discussions sur le nucléaire
L'Union européenne (UE) et l'Iran ont annoncé samedi une reprise "dans les prochains jours" des pourparlers sur le dossier nucléaire suspendus depuis plus de trois mois, à l'occasion d'une visite surprise à Téhéran du dirigeant européen Josep Borrell.
M. Borrell, le chef de la diplomatie de l'UE, et le ministre des Affaires étrangères iranien Hossein Amir-Abdollahian ont fait ces annonces lors d'une conférence de presse conjointe à Téhéran après un tête-à-tête de deux heures.
Les pourparlers lancés à Vienne en avril 2021 entre l'Iran et les grandes puissances (Russie, Etats-Unis, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne) sont au point mort depuis mars, les adversaires américain et iranien s'accusant mutuellement de les bloquer.
Ils visent à réintégrer les Etats-Unis au pacte de 2015 prévoyant des limitations au programme nucléaire iranien, dénoncé en 2018 par l'ex-président américain Donald Trump, et à ramener l'Iran au respect intégral de ses engagements dictés par ce pacte, appelé JCPOA.
Conclu par l'Iran et les six puissances, le JCPOA vise à garantir le caractère civil du programme nucléaire de l'Iran, accusé de chercher à se doter de l'arme atomique malgré ses démentis, en échange d'une levée progressive des sanctions internationales asphyxiant l'économie iranienne. Or l'administration Trump avait rétabli les sanctions américaines, provoquant l'ire de l'Iran.
"Ma visite a pour principal objectif de briser la dynamique actuelle c'est-à-dire la dynamique de l’escalade" et de sortir de l’impasse, a déclaré M. Borrell, accompagné lors de sa visite d'un jour à Téhéran du coordinateur de l'UE chargé de superviser le dialogue de Vienne, Enrique Mora.
"Nous allons reprendre les discussions sur le JCPOA dans les prochains jours", a-t-il dit. Et "quand je dis dans les prochains jours cela veut dire rapidement et immédiatement".
- Avantages économiques -
Pour M. Borrell, l'un des obstacles majeurs qui bloque les progrès dans les négociations est l'inimitié entre l'Iran et les Etats-Unis, deux pays qui n'entretiennent pas de relations diplomatiques depuis 1980.
"Il y a des décisions qui doivent être prises à Téhéran et à Washington, mais nous avons convenu aujourd'hui que cette visite sera suivie par la reprise des négociations également entre l'Iran et les Etats-Unis facilitées par mon équipe pour tenter de résoudre les problèmes en suspens", a-t-il dit.
A Vienne, les Etats-Unis et l'Iran tiennent des discussions indirectes, via l'UE.
M. Borrell a souligné devant son interlocuteur iranien les avantages économiques que pourrait tirer l'Iran d'une relance de l'accord de 2015, alors que ce pays souffre des sanctions.
"Nos relations bilatérales ont un énorme potentiel, mais sans un JCPOA fonctionnel, nous ne pouvons pas les développer pleinement", a-t-il dit dans un tweet.
Il a également soulevé la question de la "détention déconcertante de citoyens de l'UE en Iran", allusion à plusieurs Occidentaux détenus en Iran, sous des accusations d'espionnage ou autres.
De son côté, M. Amir-Abdollahian a souligné que son pays était "prêt à reprendre les pourparlers dans les prochains jours".
"Ce qui est important pour la République islamique d'Iran, c'est le plein avantage économique que l'Iran doit tirer de l'accord conclu en 2015", a-t-il ajouté, en référence surtout à la levée des sanctions.
"Nous essaierons de résoudre les problèmes et divergences à travers les pourparlers qui reprendront bientôt", a-t-il poursuivi.
Ni M. Borrell ni le ministre iranien n'ont avancé de date précise pour la reprise des pourparlers.
- "Réversibles" -
Le dossier nucléaire empoissonne de longue date les relations entre l'Iran et la communauté internationale.
L'administration américaine de Joe Biden a dit vouloir revenir dans l'accord de 2015, à condition que Téhéran renoue avec ses engagements, tandis que l'Iran exige auparavant la levée des sanctions.
Début juin, après que les Etats-Unis et les Européens ont fait voter une résolution à l'AIEA dénonçant le manque de coopération de Téhéran, l'Iran a déconnecté des caméras de surveillance de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) sur ses sites nucléaires.
Mais il a ensuite souligné que ces mesures étaient "réversibles" en cas d'accord à Vienne.
Après la désactivation des caméras, le directeur général de l'AIEA, Rafael Grossi, avait averti que si le blocage persistait, "dans trois ou quatre semaines" l'AIEA ne serait plus en mesure de surveiller le programme nucléaire iranien.
Selon des experts, les pourparlers de Vienne butent aussi sur le refus américain de céder à une demande clé de Téhéran: le retrait des Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de l'Iran, de la liste américaine des "organisations terroristes".
R.Salamanca--ESF