Foot: la possible reconduction de Ceferin ouvre une crise à l'UEFA
Zvonimir Boban, directeur du football de l'UEFA, a claqué jeudi la porte de l'instance pour protester contre une manœuvre de son président Aleksander Ceferin, qui lui permettrait de se faire réélire jusqu'en 2031.
Cette procédure engagée par Ceferin fait écho à des modifications réglementaires similaires menées l'an dernier à la Fifa et envisagées au Comité international olympique.
Demi-finaliste du Mondial-98 avec la Croatie, l'ex-milieu du Milan AC explique, dans un courrier envoyé à plusieurs médias européens, avoir fait part à Ceferin de "sa grande inquiétude et sa totale désapprobation" à l'idée de prolonger le bail du président hors de la limite de douze ans qu'il a lui-même introduite.
Le patron du foot européen "a répondu, qu'à ses yeux, il n'y avait aucun problème légal, moral ou éthique, et qu'il persisterait sans le moindre doute avec cette idée à mon avis désastreuse", écrit Boban, qui a choisi de "quitter l'UEFA" au nom des "principes et valeurs auxquels (il croit) profondément".
Dans un court communiqué, l'instance européenne "exprime sa gratitude à M. Boban pour ses services dévoués" et évoque un départ "d'un commun accord" de son chef du football, en poste depuis 2021, sans commenter les vives critiques adressées à Aleksander Ceferin.
- Ceferin se dit "très fatigué" -
Pourtant l'éventuel maintien de l'avocat slovène de 56 ans à la tête de l'UEFA promet d'être le principal sujet du 48e Congrès de l'organisation, qui se tiendra le 8 février à Paris, d'autant que le débat dépasse le foot européen et touche à la gouvernance du sport mondial.
Aleksander Ceferin, qui préside l'UEFA depuis septembre 2016 et a été reconduit en avril 2023 pour ce qui aurait dû être son dernier mandat de quatre ans, a présenté en décembre, lors d'une réunion du comité exécutif, une proposition d'amendement aux statuts de l'instance qui lui ouvre la possibilité de prolonger.
Techniquement, ce texte soumis au vote du prochain congrès ne supprime pas la limite de trois mandats, l'une des mesures clés prises en avril 2017 par le dirigeant slovène, après la cascade de scandales qui avaient entraîné des limitations similaires à la Fifa et au CIO.
Mais l'amendement consulté par l'AFP précise que cette règle, valable pour tous les membres du comité exécutif, ne prend pas en compte les mandats "commencés avant le 1er juillet 2017", soit le premier bail de Ceferin. La seule justification fournie est "le principe juridique de non-rétroactivité".
"Je n'ai pas encore décidé si je veux solliciter un nouveau mandat ou pas. Pour être honnête, je suis très fatigué", a balayé le dirigeant mercredi, interrogé par le Daily Telegraph.
- Après Infantino et avant Bach ? -
Dans la même série de propositions figure la suppression de l'âge limite de 70 ans pour être élu ou réélu au comité exécutif, au motif que le plafonnement à trois mandats "est considéré comme suffisant à cet égard".
Or, il s'agit de l'autre mesure mise en avant par Ceferin en 2017 pour rompre avec un "système vieux et corrompu", rappelle Boban. Avec ces réformes "historiques", l'avocat slovène avait "gagné le respect de toute la communauté du football et du public, et était devenu une autorité morale incontestable et, pour beaucoup, un guide vers un football meilleur", insiste le Croate.
Si l'UEFA devait adopter ces changements en février, elle emboîterait le pas de la Fifa: réélu en mars 2023 par acclamation, son patron Gianni Infantino avait fait préciser qu'il achevait son "premier mandat", écartant donc du calcul des trois mandats maximum la période 2016-2019, lorsqu'il avait été élu après la démission de Sepp Blatter.
Un débat identique agite le Comité international olympique, dirigé depuis 2013 par l'Allemand Thomas Bach, qui doit théoriquement quitter son poste en 2025. En octobre dernier à Bombay, quatre membres de l'organisation ont suggéré une réforme des textes lors de sa prochaine session, en juillet à Paris, pour lui permettre de prolonger.
Si Bach réserve pour l'heure sa position, cette idée est loin de faire l'unanimité. "Je fais attention au type d'image que l’on peut donner autour du monde", avait ainsi souligné le Japonais Morinari Watanabe, président de la Fédération internationale de gymnastique, rappelant les "problèmes de corruption" qui ont terni la réputation du monde sportif.
V.Morales--ESF